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L’abattage des bouquetins du Bargy est suspendu !

Suite à un recours inter-associatif et une forte mobilisation, le Tribunal administratif de Grenoble vient de suspendre, avec effet immédiat, l’abattage d’un grand nombre de bouquetins en Haute-Savoie. Ces abattages avaient été autorisés par arrêté préfectoral à partir du 15 mai, au prétexte de lutter contre la brucellose. Pourtant, plus de 9 individus sur 10 sont sains.

Mercredi 18 mai 2022 Biodiversité

En novembre 2021, un nouveau cas de contamination à la brucellose bovine a été diagnostiqué dans un élevage en Haute-Savoie. Sous la pression des producteurs locaux de reblochon et de la filière économique de la viande bovine, la préfecture de Haute-Savoie a signé le 17 mars 2022 un arrêté préfectoral, autorisant l’abattage indiscriminé d’un maximum de 170 bouquetins dans le massif du Bargy au cours de l’année 2022.

La réponse des associations

Avec d’autres associations (Animal Cross, ASPAS, AVES, LPO, One Voice), FNE AURA et Haute-Savoie ont déposé le 22 avril un double recours juridique auprès du tribunal administratif de Grenoble. Un recours suspensif, et un recours sur le fond. Suite à la première audience du 11 mai 2022, les juges ont ordonné la suspension immédiate de la campagne d’abattage qui était sur le point de commencer. D’un point de vue juridique, en suspendant l’article 1 de l’arrêté, et lui seul, le juge des référés ne s’est prononcé que pour l’année 2022. C’est le jugement sur le fond qui déterminera si les mesures prévues jusqu’en 2030, et notamment le tir de 20 bouquetins par an, seront validées ou pas. Le combat pour la préservation des bouquetins sains du Bargy n’est donc pas terminé.

Une consultation publique réglementaire de 21 jours, ouverte jusqu’au 7 mars, avait recueilli 2335 avis citoyens. En dépit de 84% d’opinions défavorables au projet d’arrêté, le rapport d’analyse de la consultation avait établi la conclusion suivante. « Les avis n’apportent pas d’éléments susceptibles de remettre en cause la stratégie élaborée par l’État dans le but de maîtriser l’enzootie de brucellose dans le massif du Bargy pour la période 2022-2030 ».

Une pétition avait également été lancée pour faire annuler la décision des pouvoirs publics, et empêcher le massacre. Elle a recueilli plus de 15.000 signatures.

Le Bouquetin des Alpes (Capra ibex) est une espèce protégée au niveau international. Moins de 400 individus vivent dans le massif du Bargy. Il est concevable que l’euthanasie d’animaux séropositifs avérés contribue de manière dérogatoire à réduire un foyer infectieux pour des impératifs sanitaires. Cependant, la destruction d’individus sains n’est pas acceptable. Le statut d’espèce protégée impose en outre une exigence de garantie sur l’efficacité des actions permises par la dérogation.

Contre l’avis des scientifiques

Les scientifiques du Conseil National de Protection de la Nature (CNPN), instance consultative du Ministère de la Transition Écologique, avaient pourtant également rendu le 27 janvier 2022 un avis défavorable à l’unanimité, ce qui est rare. Selon ces experts :

  • Le cas révélé en 2021 ne semble pas dû à une transmission directe entre bouquetin et bovin. Il apparaît indispensable et prioritaire d’élucider le mode de contamination qui a prévalu.
  • Le taux de prévalence de la brucellose est désormais évalué à environ 4% de la population des bouquetins dans le cœur du massif. Il a été divisé par 10 en 5 ans. Il est même considéré comme nul en zones périphériques. L’infection devrait s’éteindre naturellement, à conditions de respecter un certain nombre de mesures de prudence au cours des années à venir.
  • L’abattage indiscriminé, de plus ciblé sur les femelles en âge de procréer, désorganise la hiérarchie sociale dans les hardes. Il contribue par ailleurs à la contamination de davantage d’individus, comme cela a déjà été constaté à la suite des abattages massifs de 2013 et 2015.

Les experts soutenaient également la mise en œuvre de mesures alternatives recommandées par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES). Ces mesures sont basées sur des études réalisées entre 2015 et 2021. Ainsi, des captures assorties de contrôles avec euthanasie des bouquetins séropositifs, effectuées par les agents de l’Office Français de la Biodiversité (OFB), alliées à des mesures de biosécurité (séparation stricte des zones de pâturage, parcages de qualité, élimination des pierres à sel et réduction de la divagation des chiens) doivent permettre d’éradiquer le foyer épidémique.

Vers une cohabitation plus apaisée

France Nature Environnement milite pour une cohabitation apaisée en montagne. Nous avons soutenu la même position pour les vaches de Saint-Laurent, dont une seule sur 219 était infectée par la brucellose, que pour les bouquetins du Bargy, dont 96% sont sains. Contrôler systématiquement, préserver les animaux sains, et n’éliminer que les individus infectés. L’inquiétude des éleveurs et des producteurs de reblochon exposés est compréhensible. Celle des défenseurs de la faune sauvage également. Pour nous, les abattages indiscriminés datent d’un autre temps, et une démarche mieux concertée en vue d’une cohabitation apaisée est possible et souhaitable.

Ressources complémentaires

Pour tout savoir sur l’affaire des bouquetins du Bargy, découvrez notre vidéo.

Retrouvez ici les reportages de Brut, Reporterre, Le Monde, National Geographic

Faire barrage à de telles atteintes à l’environnement et agir devant les tribunaux représente des frais importants. Soutenez notre action juridique et aidez-nous à défendre la Nature en faisant un don sur HelloAsso !

Contact

Jean-Pierre Crouzat
06.11.24.04.21

 

Crédits photos dans l’ordre : E. Pioche, J. Bisetti, D. Robin

Publié par FNE Haute-Savoie

Le Mercredi 18 mai 2022

https://www.fne-aura.org/actualites/haute-savoie/labattage-des-bouquetins-du-bargy-est-suspendu/

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