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RETENUES COLLINAIRES ou BASSINES

Retenue Collinaire ou Bassine

Créer des barrages ou des «bassines» pour lutter contre la sécheresse: une proposition inefficace, irresponsable et contraire à l’intérêt général et à celui des agriculteurs en particulier. Non seulement les ministres de l’agriculture qui se succèdent laissent libre cours à la contamination chimique de notre environnement naturel et humain, ainsi qu’à la stérilisation des sols, mais ils veulent maintenant modifier artificiellement l’hydrologie de nos territoires, dans l’ignorance totale des règles qui régissent le cycle de l’eau et au détriment de l’intérêt général. En effet, le ministère de l’agriculture a annoncé la création prochaine d’une soixantaine de retenues d’eau, prétextant que les précipitations qui tombent en automne et en hiver sont inutiles et perdues (!!), et donc qu’il faut les stocker. A cette occasion, les ministres font la preuve de leur totale ignorance et/ou de leur irresponsabilité. La pluie et la neige qui tombent en automne/hiver ne sont pas inutiles et perdues. Bien au contraire, l’eau qui s’infiltre et réalimente les nappes dans le sous-sol est beaucoup plus utile pour l’ensemble des utilisateurs et, notamment, pour les agro-écosystèmes, que l’eau stockée dans des retenuesqui ne servira qu’à irriguer les grandes cultures de quelques exploitations de taille très importante, notamment les maïsiculteurs, et donc une part infime des terres agricoles.

Les raisons pour lesquelles les retenues ne sont pas la solution face à la sécheresse

1.Les barrages assèchent(!) les secteurs situés à leur aval etainsi détruisent tous les écosystèmes, notamment les agro-écosystèmes, autour de la rivière. Ces barrages brisent également la continuité écologique et constituent un obstacle pour beaucoup d’espèces comme les poissons migrateurs notamment.

2.Les barrages détruisent, en les noyant, les zones humides situées en amont, zones qui jouent le rôle d’éponge extrêmement utile, en stockant l’eau en période humide et la restituant en période sèche.

3.Alors que les réserves souterraines ne sont pas sujettes à l’évaporation, les retenues d’eau superficielles subissent une très forte évaporation en période de fortes chaleurs et conduisent ainsi à une perte importante de la ressource en eau (voir exemple du barrage de la Sep cet été!). Des études récentes (Friedrich 2018, Habets et Molénat 2018) montrent que les pertes par évaporation sur les lacs de l’ouest américain peuvent aller de 20 à 60 % des flux entrants, ce qui constitue des pertes considérables. C’est donc une hérésie totale de faire passer les ressources en eau sous-terraines, qui assurent une humidification généralisée des sols très efficace, en surface pour en perdre une part très importante par évaporation!

4.La problématique est identique avec la création de «bassines» qui consiste à creuser artificiellement dans le soldes trous, d’une taille pouvant aller de quelques hectares à plusieurs dizaines d’hectares et à les remplir en pompant l’eau dans les nappes souterraines ou dans les rivières (voir le projet du marais poitevin).Là encore la ressource souterraine utile à tous les écosystèmes et à tous les utilisateurs se retrouve en surface, soumise à l’évaporation et à la pollution, pour le bénéfice unique de quelques producteurs de cultures non adaptées au terroir local.5.Les études faites sur différents secteurs en Espagne (Lorenzo et al., 2013, Wan et al. 2018) montrent que ce sont les zones les plus équipées de barrages qui soufrent le plus de la sécheresse. Les barrages aggravent la sécheresse en favorisant l’évaporation et en permettant une utilisation non rationnelle de la ressource en eau. Les études concluent que la gestion de la ressource via les barrages accroit l’intensité et la durée de la sécheresse qui est multipliée par un facteur de 2.

6.Seulement 6 % des terres agricoles sont équipées pour leur irrigation. Donc ces retenues ne serviront qu’à irriguer les grandes cultures de quelques exploitations de taille très importante, notamment les maïsiculteurs. En particulier, ces retenues n’apporteront strictement rien à la très grande majorité des éleveurs des Combrailles, du Sancy, de l’Artense ou du Cézallier. Bien au contraire, ces barrages contribueront à assécher les zones d’élevage.

7.La construction de retenues d’eau va aggraver à terme la vulnérabilité de l’agriculture vis-à-vis de la ressource en eau en empêchant la transition vers une agriculture résiliente et responsable, économe en eau. La construction de ces barrages est donc une fuite en avant irresponsable qui n’assure pas l’avenir d’une agriculture résiliente et qui ne va servir qu’une très faible minorité de la profession.

Ce qui est souhaitable de faire

Il faut retenir le plus possible l’eau sur nos territoires, mais pas en créant des barrages ou des «bassines», en favorisant son infiltration dans les sols et en limitant au maximum son ruissellement et son évaporation. C’est la seule gestion responsable des ressources en eau, au bénéfice des agriculteurs et des autres utilisateurs. Pour cela, de nombreuses modifications doivent être apportées au niveau de la gestion de l’espace et des pratiques agricoles.

1).Tout d’abord, il faut limiter au maximum l’imperméabilisation des sols, notamment par les bétonnages et les bitumages inutiles.

2).Au niveau des pratiques agricoles, il est nécessaire:

-.d’arrêterle drainage des zoneshumides qui conduit à une évacuation rapide des eaux vers l’aval sans aucun bénéfice pour les sols,

-.de limiter l’utilisation d’engins agricoles monstrueux qui tassent et imperméabilisent les sols de façon irréversible,

-.de ne pas travailler les terres dans le sens de la pente, ce qui a pour conséquence de favoriser le ruissellement et le lessivage des terres,

-.etc.

3).En revanche, il est urgent:

-de replanter des arbres et des haies. Ce sont des éléments essentiels dans la régulation du climat local, notamment pour limiter les pertes d’eau par évaporation. Il faut donc développer l’agroforesterie de toute urgence.

-de privilégier les variétés végétales et les races animales adaptées à nos conditions environnementales. En cela,la sauvegarde de la biodiversité agricole est essentiellec.de procéder de façon à ne plus avoir de sols nus en hiver, par l’installation de cultures intermédiaires.

-Etc.

PS: Observations locales à l’appui des considérations précédentes:

1)Le barrage de la Sep a perdu,à l’été 2019,une quantité d’eau considérable par évaporation et la concentration des pollutions qui en a résultéa rendu l’eau inutilisable pour l’irrigation … Ce qui est quand même un comble.(voir article dans le journal La Montagne).

2)Tous les observateurs peuvent constater, au plus fort des épisodes de sécheresse et de canicule, que les seules zones avec de l’herbe encore un peu verte sont dans des secteurs où le maillage de haies est assez resserré. La haie a un rôle essentiel, notamment pour l’élevage.

3)On peut rajouter le problème du bien être animal, on observe de plus en plus fréquemment des troupeaux subissant des températures supérieures à 40°C pendant plusieurs jours, sans un seul arbre pour se mettre à l’ombre … Même observation en hiver pour faire face aux intempéries, et notamment au vent

Contact:Christian Amblardchristian.amblard@uca.fr   GREFFE: Groupe Scientifique de Réflexion et d’Information pour un Développement Durable

Publié par FNE Puy-de-Dôme

Le Lundi 03 août 2020

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