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1 an après Lubrizol, pas d’amélioration dans la gestion des sites industriels

Un an après, les conséquences de l’incendie de l’usine Lubrizol à Rouen, le 26 septembre 2019, font encore l’objet de nombreux débats. La terrible explosion de Beyrouth cet été a de son côté rappelé à la France la catastrophe d’AZF et l’importance d’une gestion exemplaire des sites industriels et produits dangereux, même dans le domaine agricole. France Nature Environnement milite pour un changement en profondeur de la gestion des sites industriels, comprenant de réels moyens pour appliquer la réglementation, une révision globale des processus de concertation ainsi qu’une meilleure intégration et information des populations. Alors que l’assouplissement des normes suit son cours, le 2nd plan d’action post-Lubrizol du gouvernement répondra-t-il à ces attentes ?

L’assouplissement des normes suit son cours

L’accident de Lubrizol est un dossier emblématique car il a, dès les premiers jours, mis en évidence l’opacité grandissante sur les sites « Seveso » et le danger de l’assouplissement des normes qui suit son cours depuis plusieurs années. Il illustre parfaitement une crainte mise en avant par France Nature Environnement depuis de nombreuses années : que la prétendue « simplification » du droit de l’environnement ne mette en péril la sécurité des citoyens et la protection de l’environnement. Car si la France dispose d’un droit suffisant pour assurer la sécurité des sites industriels, ces règles sont régulièrement remises en cause.

Des sites sont par exemple « sous-classés »[1] : c’est-à-dire soumis à des contraintes sous-évaluées, inadaptées à leur niveau de risque, comme France Nature Environnement l’a montré pour les entrepôts. En permettant plus de souplesse aux industriels, l’Etat se désengage de son devoir de contrôle des installations dangereuses.

Ces régressions du droit de l’environnement se poursuivent aussi au Parlement. Lundi 28 septembre, l’Assemblée Nationale examinera le projet de loi dit « ASAP », d’accélération et de simplification de l’action publique. Si l’objectif de simplification est a priori louable, ce projet de loi dissimule en réalité de nouvelles atteintes au droit de l’environnement et à la participation du public… ce qui participe malheureusement à réduire les garanties contre les atteintes à l’environnement et la culture du risque.

Qu’espérer des annonces du gouvernement ?

Face à de tels constats, arrêter de faire reculer le droit de l’environnement est un impératif. D’autres mesures peuvent également changer la donne :

Mieux faire appliquer la réglementation existante. Alors que le nombre de contrôles des sites industriels a largement diminué ces dernières années[2], le nombre d’accidents industriels a bondi de plus de 34% en 2 ans[3]. De véritables moyens humains et financiers, et une réelle indépendance de l’inspection, sont primordiaux pour instruire les dossiers, effectuer des contrôles, assurer un suivi rigoureux des établissements, sanctionner les exploitants en situation d’infraction… Il faut également augmenter le nombre de parquets spécialisés et créer un délit de mise en danger de l’environnement. La spécialisation est la seule solution pour que les magistrats se familiarisent avec des contentieux techniques et avec des dossiers aux conséquences parfois difficiles à appréhender. Les comportements dangereux attentatoires à l’environnement doivent pouvoir être sanctionnés, lorsqu’une obligation particulière de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou par le règlement est délibérément violée. C’est pourquoi un délit de mise en danger de l’environnement avec des sanctions suffisamment dissuasives est nécessaire.

Mieux informer, mieux concerter. Des instances de concertation existent autour des sites à risque. Leur organisation, leur gouvernance et les modalités de participation doivent être revues pour qu’elles reprennent leur rôle : permettre le dialogue entre acteurs locaux (industriels, élus, riverains, associations…), l’amélioration des projets et la circulation de l’information. L’information des riverains est d’ailleurs un enjeu primordial : savoir que l’on habite à proximité d’un site à risque et savoir comment réagir en cas d’accident sont à la base de la culture du risque. Les informations sur ces sites doivent être ouvertes, accessibles et transmises de manière efficace. Les données sur les produits en présence doivent quant à elles être complètes et transparentes.

« Au-delà des annonces gouvernementales à venir, nous espérons que des moyens financiers additionnels seront alloués à la gestion des sites industriels dans le projet de loi de finances 2021, qui sera présenté en conseil des ministres lundi prochain. Sur le terrain, les attentes sont fortes et nous suivrons avec attention la mise en place des mesures à venir », conclut Ginette Vastel, pilote du réseau Risques et Impacts Industriels de France Nature Environnement.

France Nature Environnement a réalisé un dossier sur les leçons à tirer de l’accident de Lubrizol, ainsi qu’un document mémoire pour analyser les points critiques sur l’incendie, sur la démocratie environnementale et sur l’encadrement juridique des installations classées (ICPE).


[1] Les sites les plus dangereux sont soumis au régime des installations classées (ICPE). Mais depuis plusieurs années, on observe une chute du nombre de ces installations (autorisation) au profit d’installations relevant d’un régime moins contraignant (enregistrement).
[2] En 2006, il y a eu 30 000 contrôles des risques industriels, en 2018, seulement 18 196.

Pour aller plus loin

Après Lubrizol : un premier plan d’action positif mais insuffisant

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Publié par FNE Auvergne Rhône Alpes

Le Jeudi 24 septembre 2020

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