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La loi climat, véritable perdante de la semaine

« Le pire est à venir, avec des implications sur la vie de nos enfants et nos petits-enfants bien plus que sur la nôtre » indique le GIEC dans les extraits de son futur rapport. Les sénateurs viennent de voter le projet de loi climat et résilience, qui devait traduire les propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat. Objectif annoncé : mettre la France sur la bonne trajectoire pour atteindre les objectifs climat fixés par les conventions internationales. Mais le projet de loi initial était insuffisant, les députés ne l’ont pas amélioré de façon significative, et les sénateurs n’ont pas non plus pris leur part de responsabilité pour préparer notre pays à l’urgence écologique et aux modifications majeures qui nous attendent. Pressions de tous bords et préoccupations immédiates : 1 – Climat et environnement : 0.

Victoire de la publicité et de l’artificialisation des sols, défaite de la transition énergétique

Dans la guerre contre le plastique et le papier inutiles, le Sénat joue dans le camp du gaspillage : il a supprimé l’expérimentation du dispositif « Oui pub », premier pas timide vers moins de publicité imposée dans nos boîtes aux lettres, et l’interdiction des emballages en polystyrène à partir de 2025, pourtant ô combien nécessaire pour nos océans.

Dans le combat contre l’artificialisation des sols, cause majeure de disparition de la biodiversité, les sénateurs n’ont pas voulu risquer de fâcher : ils ont rendu l’objectif « zéro artificialisation nette » en 2050 seulement incitatif, non contraignant.

La transition énergétique est également mise en péril, avec à la fois des mesures visant à complexifier le développement des énergies renouvelables (notamment le pouvoir donné aux maires de refuser un projet éolien) et leur corolaire plein d’ironie : l’interdiction de l’arrêt de réacteurs nucléaires en l’absence de capacités de production d’énergies renouvelables équivalentes.

Des gros reculs ont également été votés en matière de transport, secteur pourtant le plus émissif : la suppression de l’avantage fiscal au transport routier de marchandises, mesure clé pour rendre le transport de marchandise par voies ferroviaire ou fluviale plus attractif et améliorer la qualité de l’air, est rendue encore plus hypothétique (elle était déjà prévue seulement pour le prochain mandat). La possibilité pour les régions qui le souhaitent de demander aux transporteurs routiers de contribuer financièrement pour compenser leurs effets négatifs (pollution de l’air, émissions de carbone, dégradation des routes…) est quant à elle supprimée.

Concernant l’alimentation, malgré les demandes convergentes des ONG et de la filière française de production de viande d’une politique encourageant à manger moins de viande mais de meilleure qualité, les sénateurs ont supprimé la pérennisation de l’expérimentation sur les menus végétariens (elle sera juste prolongée).

En matière juridique, une des rares dispositions utiles, celle sur le référé environnemental, est supprimée. Elle aurait pourtant pu permettre d’éviter ces nombreux cas où les bulldozers vont plus vite que la justice. Trop souvent encore, des projets sont déclarés illégaux alors que les destructions ont déjà eu lieu (dernier exemple, le grand contournement Ouest de Strasbourg).

Protection des rivières, préservation des forêts : des occasions manquées

Bon nombre de nos propositions pour améliorer le texte ont été rejetées. Nous déplorons notamment le refus d’un Plan National d’Education à la Transition Ecologique et de mesures plus exigeantes pour préserver nos forêts et les adapter au changement climatique, l’absence d’une obligation de rénovation progressive et bénéfique pour tous, et un délit de mise en danger de l’environnement toujours impossible à mettre en œuvre.

Pas non plus d’amélioration pour nos rivières : après bien des débats, les sénateurs ont finalement conservé la disposition votée à l’Assemblée Nationale mettant les rivières en péril. Les propriétaires de moulins qui le souhaitent ne pourront plus demander à l’Etat une aide pour effacer les seuils qui entravent les rivières. Cette grave remise en cause de la politique de restauration de la continuité écologique, au prétexte du développement d’une énergie renouvelable au bilan dérisoire, actée à l’Assemblée, se voit confirmée par le Sénat.

Timides avancées sur la mobilité durable et le photovoltaïque

Sur certains sujets, les sénateurs ont su faire progresser le texte. A souligner en premier lieu : leur définition d’une rénovation performante d’un logement (étiquette A/B) est à saluer alors que le gouvernement souhaite se contenter du niveau C. Malheureusement, les moyens d’y parvenir tels qu’une obligation de rénovation (demande initiale des 150 citoyens) ont été mis de côté et l’interdiction de location des passoires a été reculée, laissant peu d’espoir d’atteindre l’objectif BBC du parc bâti en 2050.

A noter aussi, ils ont élargi l’obligation d’installer des panneaux photovoltaïques à certains parcs de stationnement. Répondant à une demande de France Nature Environnement, ils ont précisé que les contrats de plan État-régions devraient contribuer à donner aux régions les moyens d’atteindre leurs objectifs de transition énergétique.

De même, le programme national pour l’alimentation prévoira des actions pour encourager l’équilibre de la consommation de protéines végétales et animales (voir notre vidéo qui explique pourquoi c’est important pour le climat). Autres demandes de longue date des ONG enfin satisfaite : la baisse de la TVA à 5,5 % pour le transport ferroviaire, afin de rendre plus accessible ce mode de transports peu émissif et la possibilité de cumuler le forfait mobilité durable (aide de l’employeur pour les trajets en vélo ou en co-voiturage) avec le remboursement de l’abonnement aux transports en commun.

Pour Arnaud Schwartz, président de France Nature Environnement : « Englués dans les préoccupations immédiates, les pressions de tous bords et les querelles politiques, les sénateurs n’ont pas su, pour l’essentiel, prendre de la hauteur et voir l’enjeu : la transition écologique est inéluctable pour l’avenir de l’humanité ! Plus nous la repoussons, plus elle sera dure. Le dernier rapport du GIEC est très clair et le prochain risque d’être extrêmement cinglant. Nous appelons le gouvernement et les députés à ne pas bâcler cette loi pour la boucler avant l’été : le sujet est trop important. » Prochaine étape : le passage du projet de loi en Commission Mixte Paritaire, le 12 juillet. Si elle est conclusive, la loi sera promulguée… en l’état.

Publié par FNE Auvergne Rhône Alpes

Le Jeudi 01 juillet 2021

https://www.fne-aura.org/communiques/region/la-loi-climat-veritable-perdante-de-la-semaine/

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