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Proposition de Loi sur le prolongement de la concession du Rhône : Le temps s’est arrêté en 1921 ! [1]

Le prolongement de la concession du Rhône jusqu’en 2041 (18 ans[2]) au bénéfice de son concessionnaire actuel, la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), résulte de l’accord entre le gouvernement français et la Commission Européenne. Ce dernier permet de retarder l’ouverture à la concurrence de la Concession.

Ce prolongement a pour contrepartie des obligations du concessionnaire reprenant « ne variatur » les 3 missions originelles de 1921 : hydroélectricité, navigation, irrigation agricole. Cela prend la forme d’un « cahier des charges » incluant la réévaluation de la redevance de concession au bénéfice de l’État et d’un ensemble d’actions futures, rassemblées dans un « schéma directeur », financé par le concessionnaire (CNR donc) au bénéfice des territoires baignés par le fleuve.

Le gouvernement a donc engagé une procédure accélérée le 27 décembre 2021[3]. Cette manœuvre est bien-sûr à mettre sur le compte des prochaines échéances électorales et de la thrombose qui guette l’agenda parlementaire de fin de législature.

Le plus grand fleuve de France, le plus puissant, un des plus utilisés mais aussi un des plus artificialisés, réservoir irremplaçable de biodiversité à l’échelle de notre pays et de l’ouest européen, jouant un rôle clef pour l’adaptation des territoires qui le bordent aux effets du changement climatique qui les menacent, est donc traité en 2022 avec les idées de 1921 !

On aurait pu s’attendre à ce que la prise en compte du changement climatique et de la biodiversité s’ajoute aux 3 missions originelles.

Au lieu de cela, c’est toujours plus de pressions sur les milieux naturels avec le projet d’un barrage de plus, dans la seule partie non aménagée du fleuve en amont de Lyon, autour du confluent de l’Ain reprenant un ancien projet pourtant abandonné en 1985 devant ses dégâts prévisibles sur l’environnement naturel.

Si le volume financier du nouveau schéma directeur promet d’être légèrement supérieur à celui qu’il remplace, son contenu apparaît comme l’inventaire de toutes les demandes émanant des territoires sans aucune préoccupation des contradictions entre les objectifs divers poursuivis. Les « vieux Rhône » eux-mêmes, tronçons du fleuve court-circuités par les aménagements et ultimes refuges pour la biodiversité, ne sont pas épargnés. Les quelques seuils transversaux qui en perturbent les écoulements seront équipées de microcentrales hydroélectriques à la production dérisoire sans que le maintien même de ces seuils ne soit questionné.

L’attribution des fonds considérables promis à ce schéma directeur restera confinée entre l’État concédant, son concessionnaire et les groupes de pression habituels.

Le Comité de suivi de l’exécution de la concession pouvait être l’organe de validation et de mise en cohérence des actions menées dans le schéma directeur et de validation de la répartition de ces fonds dans la transparence.

Mais derrière de belles phrases creuses, ce Comité est confiné dans son rôle actuel de chambre d’enregistrement, sans autre pouvoir que celui d’être le spectateur impuissant convié, lors d’une grande messe annuelle, à prendre acte des décisions prises ailleurs.

La composition et le fonctionnement de ce Comité sont renvoyés à un vague arrêté inter préfectoral excluant d’avance tout pouvoir réel assis sur une contrainte juridique forte !

Au contraire de la plupart de ses grands affluents (Arve, Ain, Drôme, Durance, Ardèche et bientôt nous l’espérons, Isère), le Rhône, déjà dépourvu de Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE), ne disposera donc pas pour sa gestion d’une Assemblée délibérante représentative des intérêts de tous ses riverains !

A travers les amendements[4] que nous proposons, nous demandons à la représentation nationale :

  • De donner un nouveau souffle à la loi de 1921 en la dotant d’un quatrième pilier consacré à la biodiversité.
  • De prendre la seule voie possible pour concilier hydroélectricité et environnement : la priorisation de la modernisation de l’existant sur la construction de nouveaux barrages privilégiant la mise à niveau des 19 chutes existantes sur le Rhône et l’engagement d’amélioration de notre parc hydroélectrique concédé, en panne en France depuis plus de dix ans, dans l’indifférence générale.
  • D’associer véritablement la totalité des acteurs des territoires à l’utilisation des retombées financières de ce prolongement de la concession du Rhône.

Le Rhône vaut quand même mieux qu’une proposition de loi a minima votée au claquoir à l’issue d’une séance expéditive !

[1] Proposition de loi relative à l’aménagement du Rhône

[2] La concession  actuelle s’arrête le 31 décembre 2023, 75 ans après la mise en route de Génissiat, premier aménagement du Rhône de la concession.

[3] Le Gouvernement a choisi pour ce faire une procédure législative aussi expéditive que rarement employée : la procédure de législation en commission (Chapitre V bis du règlement de l’Assemblée Nationale, articles 107-1, 107-2 et 107-3)

[4] FNE AURA remercie le député Matthieu Orphelin qui a accepté de déposer les amendements que nous avons préparés dans l’urgence ainsi que les députées Delphine Bagarry, Paula Forteza et Emilie Cariou, qui les ont co-signés.

Pour aller plus loin

Concession du Rhône : les garants passent, les questions restent
Mémoire d’Ardèche et Temps Présent N°151 – Le Rhône d’hier et d’aujourd’hui : de la pratique d’antan… à la préservation du milieu

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Crédit photo : S. Dupont.

Publié par FNE Auvergne Rhône Alpes

Le Lundi 10 janvier 2022

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