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Nos positions sur le nucléaire

L’illusion d’une filière franco-française (de l’EPR) s’écrase sur le mur des réalités techno-économiques et géopolitiques

NUCLEAIRE : L’illusion d’une filière franco-française (de l’EPR) s’écrase sur le mur des réalités techno-économiques et géopolitiques

Le titre fait-il allusion à la déclaration faite le 3 septembre 2015 par le PDG d’EDF Jean-Bernard Lévy, reconnaissant que « la mise en service du réacteur EPR de Flamanville est repoussée au quatrième trimestre 2018 et son coût porté à 10,5 milliards d’euros » ? : OUI et NON !
OUI, parce que « c’est au pied du mur qu’on reconnaît le maçon », même s’il faut reconnaître sa transparence après tant de mensonges qui ont ruiné la crédibilité de l’électronucléaire français. La FRAPNA estime même qu’après s’être écrasée sur le mur des réalités, la filière EPR est aujourd’hui entrée irréversiblement dans le mur en question.
NON, parce que la phrase qui sert ici de titre a été prononcée dès le 14 mai 2013 devant les membres du CESER de Rhône-Alpes par Philippe Lebreton, représentant la FRAPNA sur ce dossier. De son intervention dans ce Colloque Transition énergétique : quel mix ?, on trouvera ici, sous leur forme de 2013, les éléments prémonitoires de jugement présentés dans un débat officiel, ouvert et équilibré.

1/ Des données officielles, il ressort qu’au 1er janvier 2010, l’endettement d’EDF s’élevait à 42,5 Md€, pour un résultat brut d’exploitation de 17,5 Md€, soit un taux d’endettement de 243 %. Dès lors, EDF peut-elle surcharger la barque avec la très dispendieuse filière EPR ?

2/ En France, depuis 2005, la consommation globale en énergie primaire a stagné puis décru, la production d’électricité nucléaire de même ; la consommation individuelle d’électricité a plafonné, le tout antérieurement à la crise financière mondiale.

3/ Au niveau mondial, la part de l’électronucléaire dans la consommation finale d’énergie est égale à 2,3 % (17,2 % d’électricité consommée x 13,5 % d’électronucléaire dans l’électricité). Doubler sa part d’ici 2050 l’amènerait à moins de 5 % tout en nécessitant la mise en route de 2 réacteurs électronucléaires chaque semaine ! Est-ce bien réaliste ?

4/ Pour conclure : d’ici à 2025, aucune construction d’EPR n’est désormais nécessaire (en France) et aucune décision fondamentale n’est urgente sur le plan nucléaire, sinon bien sûr sur le plan des énergies renouvelables. La vente dans le Monde est illusoire dans le contexte post-Fukushima.

L’illusion d’une filière franco-française s’écrase sur le mur des réalités techno-économiques et géopolitiques.

A ce point, la FRAPNA formule plusieurs remarques d’ordre économique et social :

1/ Comment admettre qu’un petit agriculteur doive émarger au RSA après avoir été mis sur la paille par ses créanciers, qu’une PME doive fermer boutique et licencier pour un découvert bancaire de 50 000 €, mais qu’une gigantesque tour de Babel dirigée par l’élite française de la techno-finance puisse engendrer, sans remise en cause, des pertes gigantesques ? Sinon, « plus une faillite est grosse, plus elle a de chances d’être renflouée » !

2/ Alors que l’opinion publique s’indigne à juste titre de la pratique des « parachutes dorés », comment l’ex-présidente d’AREVA a-t-elle pu être remerciée sans avoir à rembourser les 1,4 Md€ de pertes dans l’affaire UraMin ?

3/ Quant à trouver l’argent nécessaire à remplumer ou perfuser la filière EPR moribonde, la recette est hélas simple : consommateur et contribuable seront mis à contribution à hauteur prévisible de 30 % dans nos factures ou nos impôts. Ce qui amène aussi à s’interroger sur le comportement et le pouvoir réel des politiques : Gauche et Droite confondues couvrent imperturbablement, depuis des années, un fiasco techno-financier annoncé, prouvé et confirmé ! Anesthésiée ou résignée, l’opinion publique ne devrait-elle pas réagir, et traduire dans son propre comportement quotidien ce programme de « transition énergétique » dont on nous rebat les oreilles dans de grandes réunions politicomédiatiques ?

La SAGA de l’EPR, un lobby nucléaire choyé par les « responsables » français, du MEDEF à la CGT Chronologie du projet

1/ 2004. « Feu vert (sic !) donné (au projet) par le gouvernement Jean-Pierre Raffarin en 2004. Prévision : 5 ans de travaux ». (Audrey Garric et Jean-Michel Bezat, Le Monde, 19 novembre 2014).
2/ Mai 2006. Mise en service prévue pour 2012 ; coût annoncé 3,3 Md€.
3/ Avril 2007. Décret n° 2007-1557 (JORF du 11 avril 2007). Gouvernement Dominique de Villepin.
4/ Décembre 2007. Début du chantier.
5/ Décembre 2008. Coût porté à 4,0 Md€.
6/ Juillet 2010. Mise en service repoussée à 2014. Coût porté à 5,0 Md€.
7/ Juillet 2011. Mise en service repoussée à 2016. Coût porté à 6,0 Md€.
8/ Décembre 2012. Coût porté à 8,5 Md€.
9/ Novembre 2014. Mise en service repoussée à 2017.
10/ Septembre 2015. Mise en service repoussée à fin 2018. Coût porté à 10,5 Md€.

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Un autre dossier EPR monté par AREVA avec la Finlande (chantier Olkiluoto lancé au début de 2005 avec achèvement prévu pour la mi-2009 et un coût prévisionnel de 3 Md€) n’est pas plus fringant : à la fin de 2012, le montant de l’ardoise a été réévalué à 8,5 Md€ ; en septembre 2014, le démarrage a été repoussé à 2018.

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Pape François, Lettre encyclique Laudato Si’ (2015). Le paradigme technocratique tend à exercer son emprise sur l’économie et la politique. L’économie assume tout le développement technologique en fonction du profit, sans prêter attention à d’éventuelles conséquences négatives pour l’être humain. Les finances étouffent l’économie réelle.

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La barre des 10 milliards d’Euros 1/ Pour la première fois dans l’histoire mondiale de l’électro-nucléaire, l’EPR vient de franchir, par le haut, la barre des 10 milliards d’euros. 2/ Pour la première fois depuis 10 ans dans l’histoire du « trou de la Sécu », la branche retraite de cet organisme va franchir, par le bas, la barre des 10 milliards d’euros. Un double cocorico ?

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Références du débat Transition énergétique : quel mix ? présenté le 14 mai 2013 devant le CESER (Conseil économique, social et environnemental de Rhône-Alpes) : www.ceser.rhonalpes.fr puis : actes-transition-energetique.pdf

Eric Féraille et Philippe Lebreton

Publié par FNE Auvergne Rhône Alpes

Le Lundi 19 novembre 2018

https://www.fne-aura.org/essentiel/region/positions-sur-le-nucleaire/

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