Coup d’arrêt à un projet de plateforme industrialo-portuaire, jugé trop gourmand en eau
En 2019, notre association membre Vivre Ici Vallée du Rhône Environnement, avait engagé un recours en annulation contre un arrêté autorisant l’extension de la plateforme INSPIRA. Le tribunal administratif de Grenoble a prononcé l’annulation de l’acte le 4 mai 2021, notamment en raison de l’ampleur du projet et des besoins en eau qu'il génère.
Un projet de très grande envergure, destructeur pour l’environnement
Le projet d’extension de la plateforme industrialo-portuaire à Salaise-sur-Sanne couvre une superficie totale de 336 ha avec une surface à aménager de 221 ha, dont 123 ha de surfaces agricoles qui disparaitront sous l’emprise de la nouvelle urbanisation. Le site est situé à proximité immédiate de l’île de la Platière, une des dernières grandes zones humides de la vallée du Rhône. Cette réserve présente un grand potentiel écologique classée Natura 2000 et réserve naturelle nationale.
Par ailleurs, ce projet provoquera une importante augmentation de la consommation en eau, évaluée à hauteur de de 80 000 m3/jour, sur un territoire où la nappe alluviale est particulièrement déficitaire.
FNE Isère – comme d’ailleurs beaucoup d’autres instances consultatives – avait particulièrement insisté sur ce risque dans son avis rendu en juin 2018. La commission d’enquête publique avait notamment émis un avis défavorable au projet.
Le Roussillonnais, un territoire marqué par un déficit chronique de sa nappe alluviale
La nappe alluviale du Rhône, qui alimente les milieux alluviaux de la réserve naturelle de l’île de la Platière, est fortement exploitée. Cet abaissement chronique de la nappe dégrade l’état de ces milieux naturels à grand potentiel écologique et met sérieusement sa pérennité en péril.
En l’état actuel des prélèvements en eau et des aménagements prévus, l’absence de mise en œuvre de solution condamnerait la biodiversité de la Platière et menacerait la ressource en eau potable stratégique à laquelle contribue la nappe d’accompagnement du Rhône.
Afin de prévenir ce risque, le Comité de Bassin avait encouragé en 2017 l’ensemble des acteurs à poursuivre ou engager au plus vite les actions de réduction des prélèvements nets nécessaires déjà identifiées et avait suggéré d’explorer les pistes ouvertes par son conseil scientifique. Cet avis avait été émis en présence de la Sous-Préfète de Vienne qui avait salué « la qualité du travail accompli qui répond aux attentes de la préfecture. Il constitue un point d’étape dans les actions qui restent à mener au cours des prochains mois. »
Or 3 ans après cet avertissement, les enjeux de gestion quantitative de la ressource en eau n’ont clairement pas été pris suffisamment en compte par le porteur de projet de la plateforme industrialo-portuaire.
Un projet jugé incompatible avec le schéma directeur d’aménagement et de gestion de l’eau et des milieux aquatiques (SDAGE)
Dans le cadre de l’autorisation, la préfecture avait défini un certain nombre de mesures pour encadrer les prélèvements dans la nappe phréatique lors de la réunion du bureau du Comité de bassin en 2017. Néanmoins, le juge a relevé qu’il n’était pas établi que ces mesures pouvaient répondre aux besoins en eau des nouvelles entreprises à caractère industriel qui viendront s’implanter sur le site. Par ailleurs, l’incidence de ces prélèvements nécessaires au fonctionnement des activités industrielles n’a pas été suffisamment étudiée pour connaître l’impact à long terme sur les eaux.
Or les orientations fondamentales du SDAGE Rhône Méditerranée fixent comme objectif de s’adapter aux effets du changement climatique et de renforcer la gestion de l’eau par bassin versant et d’assurer la cohérence entre aménagement du territoire et gestion de l’eau.
Dans ces conditions, le tribunal administratif a considéré que le projet, par son ampleur, les besoins en eau qu’il génère et par l’absence d’éléments sur l’opportunité et l’impact des restrictions prévues par le préfet de l’Isère, n’était pas compatible avec les objectifs et les orientations du SDAGE 2016-2021 du bassin Rhône-Méditerranée.
« Cette décision est intéressante, car elle invite les aménageurs à prendre sérieusement en compte les enjeux liés à la gestion quantitative de l’eau ; enjeux qui se révèlent de plus en plus prégnants en raison du réchauffement climatique », souligne Jacques PULOU, vice-président de FNE Isère et pilote du réseau eau et milieux aquatiques de FNE AURA. « Il est par ailleurs regrettable que l’on soit rendu à une telle situation alors que des avertissements précis avaient été donnés aux porteurs du projet d’abord par le Conseil Scientifique du Comité de Bassin trois ans auparavant puis par l’avis négatif unanime de la commission d’enquête publique, avertissements dont ils ne semblent pas avoir tenu compte. »
Crédit photo : Réserve naturelle de l’île de la Platière, François Bassaget on Wikicommons
Pour aller plus loin - Site de Vivre Ici Vallée du Rhône Environnement
https://vivreactu.wordpress.com/
Publié par FNE Isère
Le Lundi 31 mai 2021
https://www.fne-aura.org/actualites/isere/coup-darret-a-un-projet-de-plateforme-industrialo-portuaire-juge-trop-gourmand-en-eau/
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