Hommage à Jean Poiret

Est-ce que vous connaissez Jean Poiret ? Alors, non, pas l’acteur. Mais notre vedette à nous, notre fidèle juriste bénévole, docteur en droit. Ce n’est pas du cinéma, ni de la science-fiction, mais les fragments de l’histoire d’une vie d’un homme ordinaire à la personnalité singulière. Laissez-nous vous raconter.

C’est l’histoire d’un petit garçon blondinet aux yeux bleus. Nous sommes au début des années 50, à l’extrémité nord de l’hexagone, dans le département du Pas-de-Calais. L’enfant allait régulièrement marcher le long du rivage à Boulogne-sur-Mer, en compagnie de sa grand-mère. Un jour, alors qu’ils se promenaient main dans la main, le garçon, dont l’œil fut attiré par des débris, s’accroupit sur le sable pour les ramasser. Sa grand-mère s’exclame : « Qu’est-ce que tu fais ? Vas-tu cesser ? Tu n’es pas payé pour faire cela ! »

C’est l’histoire d’un jeune homme, avide de lecture, passionné d’histoire, présentant une appétence certaine pour le travail intellectuel. Le baccalauréat en poche, il entame un cursus universitaire en droit au début des années 60. L’étudiant, publiciste, poursuivra ses études jusqu’au doctorat. Il réalisera une thèse sur les zones naturelles et rurales protégées, qu’il soutiendra en 1971 à la faculté de Lille. Ce travail de recherche universitaire est l’une des premières thèses en droit s’intéressant à la protection de l’environnement.

C’est l’histoire d’un homme en pleine fleur de l’âge, qui intégra EDF au début des années 70, en qualité de juriste d’entreprise. Dans le cadre de son parcours professionnel, il sera détaché plus de 8 années auprès du Ministère de l’industrie.

Dans les années 80, il fut un jour sollicité par un drôle de personnage, connu sous le nom de Jean-François Noblet. Sa requête : obtenir l’aval de ses supérieurs pour réintroduire le Castor dans le secteur du barrage de Notre-Dame-de-Commiers. Non sans difficulté, le juriste parvint à convaincre ses supérieurs ; l’opération de réintroduction fut un succès.

En 2004, fort de son expérience, il publiera un ouvrage sur le droit de l’hydroélectricité, décomposé en 2 tomes, valant leur pesant d’or : chaque volume comprenant plus de 1200 pages…

Enfin, c’est l’histoire d’un homme sage, plein de fantaisies, venant à bicyclette travailler bénévolement à FNE Isère trois jours par semaine. Il publiera en 2012, pour le compte de la FRAPNA Isère, un guide juridique pour lutter contre les décharges sauvages.

Jean, que de souvenirs…

Attablé des heures durant au bureau au sein de la grande salle. Votre écriture était lente et consciencieuse. De temps en temps, vous éprouviez de la colère contre votre ordinateur, qui visiblement refusait de vous obéir et vous ralentissait dans votre travail. Une multitude de petits papillons colorés venaient se poser ici et là sur nos bureaux, pour délivrer un message. Des dossiers papiers, un peu partout… Des courriers et encore des courriers, ou bien des notes écrites au crayon à papier, que Pascale venait taper patiemment à l’ordinateur.

De longues heures à échanger ensemble sur les affaires en cours ou à débattre sur l’interprétation d’un texte.

Une excursion sur le terrain pour prendre des photos en catimini sur un site illégal de stockage de déchets, d’un dénommé LAFLEUR.

Des formations auprès de nos associations membres.

Toujours à l’affût, avec Michel votre acolyte, de nouvelles atteintes à l’environnement sur le territoire de Seyssinet-Pariset et ses environs.

Un grand intellectuel, mais également un sportif ; vos mollets sont les seuls à FNE qui ne redoutaient pas la montée vers Saint-Nizier.

Et bien d’autres choses encore… Vous étiez un homme subtile, sensible, plein d’humilité. Votre force de travail et votre pugnacité forçaient le respect. Nous aimions particulièrement votre vivacité d’esprit et vos espiègleries. Vous faites partie de ces personnes qui, par leur constance et leur engagement, donnent une âme aux structures associatives.

Nous aimerions franchir la porte de la grande salle et vous voir à nouveau parmi nous, et vos affaires toujours accrochées au porte-manteau. Mais l’essentiel est ailleurs à présent.

Au nom de toute l’équipe, Jean, merci du fond du cœur pour tous ces moments partagés, votre présence et votre énergie, durant toutes ces années. S’il existe un paradis pour les juristes de votre espèce, nul doute que vous le rejoindrez.

Promis, en votre absence, nous continuerons à travailler sérieusement, en prenant garde toujours de ne jamais se prendre au sérieux.

Avec toute notre affection,

L’équipe de FNE Isère

Photo : Jean Poiret (à droite), avec son compère Michel Jacon (à gauche)