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Le programme EcoSys: présentation et webinaire d’introduction

Introduction générale

Nous connaissons tous les problèmes majeurs du monde moderne. Face à cette plus-que-crise, les élus s’agitent frénétiquement avec une inefficacité redoutable. Les citoyens conscients cherchent, eux, des solutions. Or, de même que nos problèmes d’aujourd’hui étaient les solutions d’hier, ces « solutions » sont construites dans le cadre de pensée même qui génère les problèmes… et ce faisant, en génèrent de nouveaux.

Un sentiment de désespoir peut naître de l’impression d’être dans une impasse. Sentiment justifié si l’on pense qu’il n’existe qu’une seule manière de penser, comme un enfant qui n’imagine pas qu’il puisse exister une autre langue que celle qu’il a appris à parler.

Un autre monde est possible, mais à condition d’être vraiment autre. Pour laisser une vraie place à l’autre, il nous faut déconstruire le premier.

La civilisation occidentale, actuellement largement mondialisée, est fortement structurée par la science, ou plus exactement la technoscience1. Cette technoscience puise ses origines dans la constatation de la complexité du monde, complexité trop grande pour être appréhendée dans ses détails par un cerveau humain. Dans un besoin de simplification, la méthode analytique a été choisie. Cette méthode scientifique et philosophique, utilisée pour comprendre le monde, consiste à décomposer, compartimenter les choses, découper le monde en parties. On estime qu’une fois chaque partie décrite et analysée, les rassembler tel un puzzle nous permet de comprendre le tout. Or, nous vivons dans des systèmes (naturels, culturels, sociétaux…), et ceux-ci sont complexes. Le découpage analytique que nous avons fait nous conduit à négliger les liens entre les choses, à ne pas considérer leurs interactions (ou seulement certaines) et ne nous permet pas de résoudre les problèmes complexes d’aujourd’hui.

Le défaut majeur de cette méthode est qu’en isolant une partie du système, on en change la nature. Lorsqu’ensuite on utilise ses « propriétés » au sein des systèmes naturels (sociétés, écosystèmes, cultures…) on génère des incohérences2.

Or, la croissance technoscientifique est actuellement arrivée à un niveau tellement énorme que ces incohérences ne sont plus négligeables et qu’elles mettent tout simplement l’existence de notre espèce en danger.

L’énormité de cette croissance est en elle-même à considérer, puisqu’elle est globalement exponentielle et que nous sommes dans la phase quasi-verticale de cette évolution (ici illustrée par la courbe ci-contre de l’évolution démographique, mais ce pourrait être un autre paramètre significatif de la technoscience). Ce qui veut dire que dans très peu de temps, théoriquement, cette courbe ira à l’infini, ce qui est évidemment impossible en pratique.

La très brillante, mais folle aventure technoscientifique3 va donc très bientôt nécessairement prendre fin et la culture occidentale qu’elle structure s’achèvera avec elle.

Ce qui est nécessaire maintenant et sans plus tarder est une métamorphose culturelle (une autre manière de penser) et non des modifications opérées dans les termes mêmes de l’actuelle culture, encore une fois, brillante, mais obsolète.

Doit-on pour autant rejeter la technoscience ?

Voilà qui serait encore plus rapidement (si c’est possible!) suicidaire. Tout n’est pas réversible, loin s’en faut. Nous nous sommes rendus dépendants de techniques et de savoirs et il serait profondément irresponsable de vouloir simplement se débarrasser des technosciences au prétexte qu’effectivement, leur évolution mène à un désastre. L’idée, toute différente, est de contextualiser cette technoscience dans une éthique générale nouvelle4 et dans une approche complexe (ou globale, holistique) et non plus seulement analytique5.

Afin de ne pas rester que dans la théorie, la FRAPNA Ardèche (Fédération des associations de protection de la nature d’Ardèche) a lancé un programme nommé EcoSys, visant à mettre en pratique la contextualisation systémique et éthique.

Dans notre monde moderne vacillant (mais passionnant), la FRAPNA met en exergue quatre enjeux majeurs, fortement liés entre eux :

    • le changement climatique (ou chamboulement climatique) ;
    • l’effondrement de la biodiversité ;
    • l’émergence des maladies infectieuses (humaines, animales, végétales, fongiques) ;
    • l’émergence de la violence réactionnelle.

Pour ce qui concerne le dernier de ces enjeux, il s’agit de l’émergence d’une violence généralisée en réaction à la perte d’être, perte du « soi », consécutive à l’effondrement de la civilisation (de la culture), culture qui est constitutive de l’être.

Bien évidemment, le plus urgent est de tout faire pour empêcher cette émergence, car sans cela rien ne sera possible. C’est bien cette action de prévention que nous voulons prioritairement proposer aux jeunes, car eux seuls peuvent réussir.

Pour le reste, EcoSys vise la prise en compte, en pratique, de l’émergence des maladies infectieuses dans le cadre de la gestion des milieux naturels (notamment forestiers) et du changement climatique. Il regroupe des scientifiques (spécialistes des systèmes complexes, écologues, épidémiologistes, microbiologistes…), des acteurs de la forêt et du bois ainsi que des politiques, pour l’instant uniquement ardéchois. Ce programme représente donc une voie d’accès par la pratique à la contextualisation de la technoscience classique et par là, à la métamorphose culturelle.

1Brièvement : la science est la connaissance et la technique l’action, mais en pratique, la technique est nécessaire à l’évolution de la science et vice-versa, d’où le terme de technoscience, l’une n’allant pas sans l’autre.

2L’un des exemples le plus criant de la concrétisation de cette démarche est le concept d’OGM : en intervenant directement sur les gènes, on fait abstraction de tous les processus évolutifs qui ont permis à ces gènes d’exister et d’être en cohérence les uns avec les autres, avec l’organisme, et avec tout le reste de l’écosystème. On estime qu’un gène qui code pour un caractère est indépendant ; on l’extrait donc de son contexte et on l’utilise tel quel dans des organismes qui n’ont pas coévolué avec ce gène. En faisant cela, on brise une barrière structurante et condition de la vie : la coévolution et l’historicité des éléments des systèmes vivants. La vision complexe permet de considérer le gène (ou un humain, une plante, un oiseau) non pas comme un individu propre ayant des relations optionnelles et arbitraires avec d’autres, mais comme un nœud de réseau d’interactions indissociable du reste du système dans lequel il évolue.

3Folle, car, notamment, en plus de sa nature essentiellement analytique, en supposant que la science découvre la nature telle qu’elle est, elle a été développée en dehors de tout contexte éthique.

4Ethique : Réflexion argumentée en vue du bien-agir.

5Il existe une science basée sur l’approche systémique, mais elle est actuellement totalement minoritaire.

Pour une approche « complexe » de la gestion des milieux naturels et cultivés.

EcoSys: Ecologie Systémique

L’Observatoire des Forêts d’Ardèche (OFA), fondé en 2017 par la FRAPNA, est un espace de parole et de concertation créé pour pouvoir échanger des données concernant les forêts et boisements ardéchois, et en particulier les forêts anciennes et matures. Après une période de sommeil faute de moyens financiers, nous entreprenons aujourd’hui, grâce à une petite enveloppe dédiée, de ranimer l’OFA à travers le projet EcoSys introduit ci-dessous.

Nous vivons aujourd’hui une période de crise pandémique due à une présumée zoonose1 (maladie d’origine animale transmise à l’Homme) qui s’inscrit elle-même dans une situation de changement global. Cet épisode confirme la préoccupation grandissante de l’OMS, partagée par la FRAPNA, envers les maladies émergentes zoonotiques (maladie de Lyme, Chikungunya, dengue, Ebola, SIDA…) qui concernent 75% des maladies infectieuses émergentes2. Les épidémies zoonotiques font partie intégrante de l’histoire de l’humanité (peste, rougeole, variole,…) et plus particulièrement à partir de l’invention de l’agriculture et de l’élevage3. Cependant, face à l’accélération exponentielle globale de notre société mondialisée (extinction de la biodiversité, accélération de la technologie, changement climatique, augmentation de la population), une accélération de ce type de phénomènes est en cours chez l’Homme mais aussi chez les espèces animales et végétales.

D'après Serge Morand (2015)

Les dynamiques d’émergence de ces maladies sont en lien avec nos pratiques de gestion des milieux naturels et surtout de ceux qui font l’objet d’une exploitation par l’Homme ; les milieux agricoles et forestiers. Les systèmes naturels étant des systèmes complexes, il nous faut les étudier et les gérer avec une approche complexe, systémique, qui doit compléter la méthode analytique classique (extraire un objet de son contexte en vue de l’étudier). Les concepts de la complexité des systèmes ont été théorisés, il existe aujourd’hui une science dédiée (pour en savoir plus), et leur transférabilité aux sciences de la vie nécessite d’être précisée. Non seulement ces nouvelles formes de connaissances peuvent éclairer la décision technique ou politique, mais elles fournissent aussi des outils puissants d’évaluation de la portée et des conséquences des décisions.

Ici se situe le coeur du projet EcoSys porté par la FRAPNA depuis 2018 : unir le milieu scientifique avec un pôle local, ardéchois, constitué des acteurs de la forêt (OFA) et des politiques, dans un échange dynamique d’informations et de réflexions globales autour de l’émergence des maladies infectieuses, dans le cadre de la gestion des milieux naturels et cultivés et dans le cadre du changement global (dont climatique).

Afin de mieux comprendre le projet EcoSys, et d’initier le travail de co-construction, nous organisons un Webinaire. Cette première séance sera l’occasion de présenter plus en détails le projet EcoSys et d’en préciser les différents aspects grâce à des présentations ciblées de chercheurs qui travaillent sur les sujets précédemment abordés ici (Approche complexe des systèmes naturels, émergence des maladies infectieuses, changement global, …).

1 https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/maladie-covid-19-nouveau-coronavirus 

2 Roche, B., & Guégan, J.-F. (2011). Ecosystem dynamics, biological diversity and emerging infectious diseases. Comptes Rendus Biologies, 334(5), 385‑392. https://doi.org/10.1016/j.crvi.2011.02.008

3 Wolfe, N. D., Dunavan, C. P., & Diamond, J. (2007). Origins of major human infectious diseases. Nature, 447(7142), 279‑283. https://doi.org/10.1038/nature05775

Les vidéos du webinaire

introduction au webinaire par Léa Rami et Frédéric Jacquemart. Contexte par Léa et présentation d'EcoSys par Frédéric (début 4'22)

Présentation de Janine Guespin : « la complexité sans complexe »

présentation de Janine Guespin

Discussion suite à la présentation

Échanges suite à la présentation

Présentation de David Chavalarias : « Concepts et méthodes pour l’étude des systèmes complexes: une introduction » 

Présentation de David Chavalarias

Échanges suite à la présentation

Échanges suite à la présentation

Présentation de Serge Morand
« Emergence des maladies infectieuses en lien avec la relation Homme / nature : Pour une social-écologie de la santé et du bien vivre ensemble »

Présentation de Serge Morand

Échanges suite à la présentation

Échanges avec Serge Morand

Présentation de Giuseppe Longo
« Comment les systèmes vivants sont-ils organisés ? Au delà de la mécanique de la nature, les principes de restriction et de permissivité »

Présentation de Giuseppe Longo

Échanges suite à la présentation

Discussion avec Giuseppe Longo

Présentation de Sonia Kéfi

« Comment certains écosystèmes basculent-ils d’un état à un autre ? »

La présentation de Sonia Kéfi pour le webinaire ne peut être mise en ligne pour diverses raisons et Sonia n’a pas pu non plus être présente au moment du webinaire. Nous présentons donc ci-dessous une autre de ses interventions, sur la même thématique, ainsi que les échanges qui ont eu lieu entre les différents participants lors du webinaire.

my-mooc.com : Sonia Kefi, chargée de recherche au CNRS, discute dans cette vidéo (8'28) des transitions catastrophiques dans les écosystèmes. Elle en présente le cadre conceptuel, à travers notamment les notions de basculement et d'hystérèse, et illustre cela par de multiples exemples. Puis elle montre que l'un des principaux défis en écologie scientifique pour les années à venir est d'arriver à mieux prédire et anticiper ces transitions.

Échanges entre les participants suite à présentation de Sonia Kéfi

Références bibliographiques

Ouvrages et articles cités au cours des présentations et des échanges

  • Emmanuel Wallerstein : « Comprendre le monde introduction à l’analyse des système-monde »,

éditions la découverte (2006-2009)

Interventions de Laurent Ughetto et Christine Malfoy

Laurent Ughetto : Président du Conseil Départemental de l’Ardèche

Christine Malfoy : Conseillère spéciale auprès du Président en charge de l’environnement, des grands sites, de l’énergie et des espaces naturels sensibles. 

interventions de Laurent Ughetto et Christine Malfoy, Conseil Départemental d'Ardèche

Publié par FRAPNA Ardèche

Le Jeudi 15 octobre 2020

https://www.fne-aura.org/publications/ardeche/webinaire-dintroduction-au-programme-ecosys/

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