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Vélodrome-Arena : un projet en roue-libre

Des associations, de nombreux citoyens et de plus en plus d’élus s’opposent au projet de Vélodrome-Arena à La Roche sur Foron. Voici pourquoi.

Vendredi 03 novembre 2023 Villes et territoires

Quelques jours après son élection à la présidence du Département, Martial Saddier a décidé seul, sur un coup de tête (ou de folie), que la Haute-Savoie organiserait les Championnats du monde de cyclisme de 2027. L’une des épreuves doit avoir lieu dans un vélodrome aux normes internationales. Qu’à cela ne tienne, l’argent public départemental coulera à flots et le tapis rouge sera déroulé pour ce championnat. 

Chronologie d’un projet délirant et exorbitant 

Le 25 juillet 2022, le Conseil départemental vote en faveur de la candidature de la Haute-Savoie aux Championnats du monde de cyclisme 2027. La Conseillère Virginie Duby-Muller dénonce le coût d’une telle organisation, qu’elle estime à 100 millions d’euros (M€), pour la construction d’un vélodrome olympique sans grande utilité pour les habitants du département. 

La Haute-Savoie, qui était alors la seule candidate à l’organisation de cet événement, a inévitablement été retenue par l’Union Cycliste Internationale (UCI). Le seul autre candidat, les Pays-Bas s’étant retirés à l’été 2021, estimant que le projet présentait un trop grand risque financier. 

Le 26 juillet 2022, de nombreuses associations dénoncent un tel investissement pour une simple compétition sportive, alors que le département est particulièrement en retard dans l’aménagement de voies cyclables. 100 M€ permettraient de construire 125 km de voies vertes et donc d’atteinte enfin l’objectif de 300 km d’aménagements cyclables annoncé par le Département depuis l’année 2000. 

Le 30 août 2022, l’association ACPAT lance la pétition “Non à la construction d’un vélodrome en Haute-Savoie » qui récolte assez rapidement autour de 20 000 signatures. 

Le 30 septembre 2022, après avoir longtemps gardé secret le lieu d’implantation de ce méga complexe, Martial Saddier sort finalement du bois pour annoncer qu’il serait construit sur le parking du parc des expositions de Rochexpo, à La Roche-sur-Foron. 

Quelques jours plus tard, réalisant que la construction d’un vélodrome séduisait peu, Martial Saddier décide seul que cet équipement serait un gigantesque complexe multi-activités sportif et culturel de 18 000 m². D’un coup de baguette magique, le vélodrome devient donc un espace modulable pouvant être converti en une salle de spectacle de 10 000 places (Arena), alors que Rochexpo vient d’être réaménagé pour un coût total de 20 M€ (parking compris), payés en grande partie par les contribuables, et qu’une salle pouvant accueillir 3 000 personnes a justement été prévue, avec une acoustique adaptée à l’organisation de spectacles. 

Un projet qui ne convainc personne 

Les citoyens ne soutiennent pas le projet. 87% n’y sont pas favorables d’après un sondage du journal Le Messager de mars 2023.

Même parmi les élus départementaux, très peu sont ceux qui osent affirmer leur soutien à ce projet, d’autant plus face à l’explosion des coûts de construction, puis de fonctionnement par la suite. Des voix expriment toutefois des doutes. Le 12 octobre 2022, dans Le Messager, Le sénateur Loïc Hervé appelle le Département à “retrouver une certaine modestie. Ce n’est pas parce qu’on a beaucoup d’argent qu’il faut entreprendre des projets pharaoniques”, citant l’exemple du vélodrome. 

En décembre 2022, citoyens et associations se regroupent pour former le collectif Non Au Vélodrome Arena (NAVA), qui devient une association loi 1901, le 28 mars 2023, afin d’être en mesure d’engager des procédures en justice. 

Un coût astronomique 

Le coût du projet ne cesse de prendre l’ascenseur : budgété au départ à 52 M€ (juillet 2022), il est passe rapidement à 62 M (septembre 2022), avant de monter à 74 M€ (fin 2022) et datteindre 109 M€ en septembre 2023. 

C’est sans compter les coûts d’exploitation de cette infrastructure (supérieurs à 2 M€ par an, selon Éric Adamkiewicz, maître de conférences aux universités de Toulouse et Grenoble et spécialisé dans les grands événements et équipements sportifs), ainsi que les coûts de construction et d’exploitation des parkings. 

Justement, en octobre 2023, un appel d’offres est lancé par le Département pour un marché qui porte sur la construction d’un parking-relais (non desservi par les transports publics) de 1 800 à 2 000 places, pour un coût estimé à 44 M€, soit entre 22 000€ et 24 500€ la place. 

Or, pour remplir une salle de spectacles de 10 000 personnes non desservie par les transports en commun, il faut compter 4 000 places de parking ; il manque donc encore environ 2 000 places de stationnement. 

Au-delà du coût indécent de ce projet, il est important de relever que le réseau routier autour du site rochois sera tout simplement incapable d’absorber un tel afflux de véhicules, notamment à l’heure de pointe du soir lorsque les premiers spectateurs tenteront d’accéder aux méga parkings prévus. 

La solution existe pourtant déjà

Plutôt que de construire un vélodrome estimé à plus de 100 M€ (hors parkings) pour une compétition qui ne durera que deux semaines et qui servira ensuite une cinquantaine d’adeptes de la discipline en Haute-Savoie, les associations proposent de déplacer cette seule épreuve au vélodrome national de St-Quentin-en-Yvelines, qui hébergera les épreuves en question lors des JO de Paris 2024. 

Cette solution de délocalisation d’une épreuve sportive, fréquemment utilisée lors de compétitions internationales (les épreuves de voile des JO 2024 auront lieu à Marseille, le surf à Tahiti), permet d’éviter un gaspillage financier inapproprié lors de compétitions éphémères.

Saucissonnage du projet pour rester sous les radars 

Pour tenter de faire passer son projet, le Département a recours à ce qu’on appelle dans les marchés publics le saucissonnage” (ou fractionnement artificiel des marchés publics pour échapper aux seuils). Cette tactique, pour tenter d’échapper à certaines règlementations et obligations, est pourtant interdite, mais parfois utilisée par des élus peu scrupuleux.

C’est exactement ce qu’il se passe avec le projet de parking-relais. En morcelant son projet, M. Saddier tente désespérément d’échapper à l’évaluation environnementale et à l’étude de la Commission Nationale du Débat Public qui devraient avoir lieu au regard de la taille et du coût de ce projet. 

Cesser de brûler les étapes environnementales et démocratiques 

Le 10 mai 2023, FNE Haute-Savoie écrit au préfet de Haute-Savoie pour demander le déclenchement d’une procédure d’évaluation environnementale du projet (hors parking), voire même la saisie de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP). 

En effet, la taille du projet pour le seul « vélodrome et ses équipements annexes » étant de 40 880 m2, ce projet doit obligatoirement être soumis à une évaluation environnementale, d’après l’article R122.2 du Code de l’Environnement.

Ce courrier étant resté sans réponse de la part du préfet, un nouveau courrier lui a été adressé, le 6 novembre 2023, le mettant en demeure de le faire, pour le projet de vélodrome-arena comme pour le projet de parking. 

Outre l’impact colossal de ce projet sur les finances publiques, les conséquences se feront ressentir au niveau environnemental, lors de la phase de construction, puis lors de l’utilisation de cette infrastructure non desservie par des transports en commun dignes de ce nom. 

Crédit photo bannière : Pays Rochois en Transition

Publié par FNE Haute-Savoie

Le Vendredi 03 novembre 2023

https://www.fne-aura.org/actualites/haute-savoie/velodrome-arena-un-projet-en-roue-libre/

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