Les JO 2030, KO dès le 1er round
FNE Haute-Savoie s’oppose à la tenue des JO d’hier 2030 dans les Alpes et particulièrement dans les stations haut-savoyardes retenues. Voici pourquoi.
Il est frappant de constater que deux instances, la Cour des comptes nationale et la Chambre régionale des comptes, dressent le même bilan sur la surexploitation de la montagne et sa non-reconversion au regard des changements climatiques en février 2024. Deux Cours des comptes dénoncent dans pratiquement les mêmes termes l’état actuel des stations de montagne et, last but not least, les politiques régionales de la Région Auvergne Rhône-Alpes.
Les JO d’hiver 2030 seraient un accélérateur d’un modèle de développement des stations de ski dépassé et prédateur des ressources naturelles et contraire à la recherche de la résilience de nos territoires de montagne.
Le modèle économique du ski, déjà affecté par la réalité de réchauffement climatique, est sous perfusion d’argent public (50 millions d’€ dans la neige artificielle de la part de la Région et même politique de la part du Département de la Haute-Savoie), tout en participant à la spéculation immobilière. Alors même que les Alpes sont déjà victimes du dérèglement climatique, cette candidature est un retour au siècle passé. Elle balaye le Plan Avenir Montagne de 2021 qui prévoyait la transition des territoires de montagne dans des perspectives de durabilité et d’avenir.
Les sites Haut savoyards retenus
Les deux sites, Le Grand Bornand pour le biathlon, 950m d’altitude, et La Clusaz pour le ski de fond, 1450m d’altitude, concentrent dans le massif des Aravis toutes les problématiques induites par l’industrie du ski :
- investissements de plus en plus lourds pour lutter contre le réchauffement climatique en produisant de la neige artificielle,
- perturbation du cycle de l’eau,
- augmentation de la consommation d’énergie,
- mobilité carbonée et polluante,
- sur-fréquentation touristique et perturbation voire destruction de l’environnement naturel,
- spéculation foncière et immobilière.
Les territoires alpins doivent au contraire amorcer leur transition écologique et faire évoluer leur modèle économique. L’argent public débloqué pour les JO 2030 devrait financer la transition des territoires de montagne et pas une nouvelle fuite en avant. De nombreux autres pays l’ont déjà compris et ne souhaitent plus accueillir les JO. Les candidatures de la Suède et de la Suisse ont été écartées par le Comité International Olympique (CIO) en novembre 2023, car le public sera consulté dans ces pays. La France est désormais seule en lice pour ces JO d’hiver 2030.
Comment garantir en 2030 un enneigement correct sans des installations couteuses en énergie et en eau ?
En 2024, l’annulation de grandes compétitions de ski comme celles prévues sur la piste du Kandahar aux Houches confirme l’impossibilité de garantir l’enneigement pour 2030 à de telles altitudes. Les Alpes n’ont pas été épargnées par la sécheresse depuis plusieurs années, plusieurs communes de Haute-Savoie ont dû faire appel à des camions-citernes pour leur alimentation en eau potable et les agriculteurs sont désormais confrontés à la sécheresse dans les alpages. Malgré cette crise de l’eau et les alertes des hydrogéologues, les stations de ski continuent de perturber le cycle de l’eau pour la production de neige artificielle, à grand renfort de canons et retenues d’altitude qui les alimentent.
Les stations retenues n’échappent pas à la règle. La Clusaz s’est illustrée par sa volonté de construire la retenue d’altitude de Beauregard, heureusement suspendue grâce aux recours des associations environnementales et à la forte mobilisation citoyenne.
La commune du Grand Bornand s’est quant à elle illustrée pour sa pratique du snowfarming qui, en plus de perturber le cycle de l’eau, engendre un ballet d’engins et de camions pour transporter la neige du lieu de stockage au stade de biathlon. Dans le plan de 50 millions d’€ pour la restructuration de la station, la mairie du Grand Bornand a annoncé la création de deux nouvelles fosses de snowfarming à proximité du stade de biathlon (950m), dans le but d’éviter le transport de la neige et surtout d’éviter de continuer à ternir l’image de la station.
Ces nouvelles infrastructures à créer font pourtant partie des 95% d’infrastructures considérées comme déjà existantes pour la Région. Le diable se cachant dans les détails, ces aménagements ne seront pas créés pour les JO 2030 mais pour les championnats du monde de 2028. Voici comment, par des démonstrations fallacieuses, des élus prétendent organiser des JO d’hiver dits « verts ».
La production de neige artificielle nécessite du froid, de l’eau et de l’énergie. Quid de ces trois ressources en 2030 ? Quid du froid à 1000 m d’altitude alors que les Alpes se réchauffent deux fois plus vite que le reste du monde ?
Les problématiques de mobilité
L’impact majeur des Jeux olympiques est lié au transport des athlètes et de tous les spectateurs, en particulier leur arrivée en avion et en voiture majoritairement, sur les lieux des épreuves. L’étude de l’impact d’une journée de ski montre qu’en moyenne, 52% du bilan carbone d’une journée d’un skieur provient de ses transports pour arriver dans la station.
L’offre ferroviaire pour accéder aux stations des Alpes en général et à celles de Haute-Savoie en particulier est très insuffisante. La modernisation des voies ferrées entourant le massif des Aravis (Aix – Annecy et Annemasse – La Roche – St Pierre) ne sont pas soutenues politiquement et les délais d’études et de travaux de rénovation rendent l’objectif d’amélioration du ferroviaire inatteignable à l’horizon 2030.
Les locaux repoussés, les problématiques de mobilité renforcées
En station, l’artificialisation des terres agricoles et naturelles est d’autant plus dramatique qu’elle sert à plus de 70% à des résidences secondaires inoccupées les trois quarts de l’année. Les habitants de ces stations et en particulier les jeunes ne trouvant plus de logements abordables, s’éloignent de l’activité des stations les obligeant à venir y travailler en voiture.
Les prix des logements au m2 atteignent des prix parisiens (en janvier 2024, le prix haut à La Clusaz atteint 19 070€/m2 contre 16 047€/m2 à Paris. Les populations à l’année décroissent. Ainsi entre 2015 et 2021 le Grand Bornand a perdu 4% de sa population.
Cette pression immobilière sera amplifiée par les JO 2030 et contribuera à faire disparaître des espaces naturels et des terres agricoles pourtant essentielles à la résilience de nos territoires et pour leur avenir.
Une aberration écologique, économique et démocratique
Au-delà des aspects environnementaux, ces JO 2030 sont également une aberration économique et démocratique, détaillée dans la tribune du mouvement NO JO réclamant un référendum sur le sujet.
Cette aberration économique vient d’être confirmée par le dernier rapport de la Cour des Comptes du 6 février 2024 qui souligne à la fois que « Le modèle économique du ski français s’essouffle » mais aussi que « les politiques d’adaptation restent en-deçà des enjeux ». L’argent public envisagé pour les JO 2030 doit être investi dans la transition et pas dans la perfusion d’un modèle économique détruisant l’environnement et les ressources pour la résilience des territoires de montagne.
FNE Haute-Savoie s’oppose donc à la tenue des JO d’hier 2030 dans les Alpes et particulièrement dans les stations haut-savoyardes retenues. Cet événement ne va pas dans les sens d’une transition responsable de nos territoires de montagne et accélère au contraire les impasses dans lesquelles le réchauffement climatique et le modèle économique actuels nous ont conduits.
Publié par FNE Haute-Savoie
Le Lundi 19 février 2024
https://www.fne-aura.org/communiques/haute-savoie/les-jo-2030-ko-des-le-1er-round/
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