Biodiversité : urgence absolue, l’heure n’est plus aux demi-mesures !
Réunis à Paris, les scientifiques de l’IPBES rendent aujourd’hui leur rapport sur l’état de la biodiversité à l’échelle mondiale. Leur constat est édifiant : jusqu'à un million d'espèces animales et végétales pourraient être menacées d'extinction dans les prochaines décennies. Après une telle annonce, il serait irresponsable de poursuivre des politiques au rabais. Les Etats rassemblés au G7 Environnement qui se déroule actuellement à Metz sauront-ils prendre les mesures nécessaires ? France Nature Environnement rappelle que les grands axes d’action sont connus, et appelle la France à donner l’exemple en se dotant d’une ambitieuse stratégie interministérielle.
L’Homme dépend de la nature mais la détruit méthodiquement
Le diagnostic de l’IPBES, qui réunit des scientifiques de 132 pays, précise le déclin massif de la biodiversité dans tous les milieux et sous toutes les latitudes, ainsi que l’étendue des dommages causés par les activités humaines à toute la biodiversité, de la micro-faune des sols aux espèces marines, en passant par les insectes, les oiseaux et les mammifères. Leurs préconisations demandent expressément une réorientation des politiques publiques afin d’éviter que la situation ne s’aggrave encore et ne prenne un caractère irréversible.
La biodiversité et les contributions de la nature aux populations sont pourtant le socle de notre alimentation, de la pureté de notre eau, de la régulation du climat… et du bon état des milieux naturels, condition même de toute vie future. L’humanité a pris l’habitude de bénéficier de ces équilibres naturels sans se rendre compte qu’ils sont vulnérables et fragilisés par notre mode de développement destructeur. « Nous devons reconnaître que le changement climatique et la perte de la nature sont tout aussi importants, pas seulement pour l’environnement, mais pour des questions économiques et de développement », a déclaré l’année dernière Robert Watson, le président de IPBES.
Emmanuel Macron, grand absent des travaux de la semaine
Face à l’urgence de la situation, comment comprendre l’absence du Président Macron au G7 environnement à Metz ? Ou à l’ouverture des travaux de l’IPBES ? Le président qui s’occupe de tout lui-même, qui ne manque aucune occasion de donner un avis ou d’affirmer la volonté d’exemplarité de la France, manque ainsi l’occasion de donner le signal de la nécessaire prise en compte des enjeux de biodiversité.
Pire, pendant ces travaux, son gouvernement entend organiser l’affaiblissement complet du champ de compétences du Conseil National de Protection de la Nature, qui évalue chaque année l’impact sur les espèces protégées de plusieurs centaines de dossiers. Le but annoncé est de fluidifier les décisions : la pression des objectifs de développement économique est telle que toute démarche rigoureuse d’évaluation des projets est considérée comme une perte de temps. France Nature Environnement récuse cette simplification du cours des autorisations environnementales qui revient à un renoncement concret à protéger la biodiversité et en demande la suspension immédiate.
Les solutions sont connues : place à l’action
Aujourd’hui, les constats concernant la menace climatique et la dégradation de la biodiversité sont pourtant unanimes. Il serait irresponsable de poursuivre des politiques au rabais, ou pire des politiques d’affichage sans efficacité réelle. L’heure n’est plus aux « chartes » non contraignantes ! La France doit se doter d’une ambitieuse stratégie interministérielle, avec des moyens dédiés et des objectifs chiffrés et phasés. Les grands axes des politiques nécessaires sont connus, il reste à les rendre opérationnels :
- Lutter contre l’artificialisation des sols
- Développer un réseau cohérent d’espaces naturels protégés appuyant une politique de trame verte et bleue exigeante quant aux documents d’urbanisme
- Réorienter dans la prochaine Politique Agricole Commune les pratiques agricoles vers l’agroécologie et l’agriculture biologique via des conditionnalités environnementales
- Organiser pratiquement la sortie de la dépendance aux pesticides
- Supprimer les nombreuses aides publiques défavorables à la biodiversité
- Faire appliquer pleinement la réglementation environnementale au lieu d’organiser son évitement pour des objectifs économiques de court terme
- Protéger efficacement toutes les espèces en danger et suspendre tous les excès de prélèvements qui menacent leur viabilité
- Améliorer la connaissance, la sensibilisation de tous publics, le conseil et la formation auprès des décideurs économiques
- Evaluer et piloter les politiques publiques au regard de nouveaux indicateurs intégrant au-delà de l’économie les enjeux environnementaux et l’impératif de justice sociale.
Il est temps de mettre les enjeux en matière de biodiversité au même niveau que ceux concernant le climat et de décliner, dans ces deux domaines liés, des programmes d’actions cohérents. L’inaction coûterait demain beaucoup plus cher que la mise en place dès aujourd’hui de politiques ambitieuses. « Nous avons besoin d’un sursaut citoyen, d’un passage à l’action des collectivités et de la prise en compte des enjeux de la biodiversité par le monde économique pour aller de l’avant. Le temps des constats et des controverses est passé : place à l’action ! » déclare Michel Dubromel, président de France Nature Environnement.
Crédit photo : Marc Keller
Publié par FNE Auvergne Rhône Alpes
Le Mardi 07 mai 2019
https://www.fne-aura.org/communiques/region/biodiversite-urgence-absolue-lheure-nest-plus-aux-demi-mesures/
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