Végétal local
Face aux atteintes faites au vivant et aux dégradations des milieux naturels de plus en plus fortes, chacun peut agir à son échelle afin de limiter les dégâts. Un choix judicieux du végétal que l’on plante ou de la graine que l’on sème, devient une action forte et durable dans le contexte actuel.
Vous devez vous demander en quoi le fait de choisir la bonne couleur de géranium peut bien sauver le monde. Mais tout l’enjeu est là, dans une diversification des végétaux à planter ou à semer dans nos jardins, nos espaces verts et même nos prairies !
Avec le développement du commerce à large échelle, nous avons perdu de vue nos territoires et leurs caractères au profit des plantes exotiques, colorées et produites parfois de l’autre côté de la planète. On retrouve même des espèces typiques de notre territoire, comme le Noisetier ou l’Achillée millefeuille, avec une empreinte carbone qui ne sera jamais compensée par leur propre photosynthèse ! Le risque d’introduction d’espèces exotiques envahissantes est également important, avec de forts impacts sur les espèces locales. Et puis de nombreuses espèces animales ont évolué pendant des millénaires avec la flore locale, et en sont dépendantes pour leur survie.
Pour autant, le fleurissement a encore un bel avenir devant lui car il peut permettre d’améliorer le cadre de vie tout en soutenant la biodiversité locale d’un territoire, en lui apportant nourriture et refuge. Il suffit pour cela de privilégier les espèces indigènes à chaque fois que possible… Une production locale d’espèces sauvages, rien de tel pour maintenir une identité de territoire, vous ne trouvez pas ?
Depuis 2015, la marque Végétal local répond à ces enjeux. Elle est portée par l’Office Français pour la Biodiversité (OFB) et propose un outil de traçabilité des végétaux sauvages et locaux, issus de collectes en milieux naturels, au sein de 11 régions biogéographiques qui ont été définies sur le territoire national. Cette marque est mise au service des communes, des entreprises, des agriculteurs, des particuliers, pour leurs actions de plantation d’arbres, de revégétalisation après travaux, ou encore de création d’espaces de nature. Elle contribue non seulement à la préservation de la biodiversité mais aussi au développement d’une économie locale car elle dépend du travail passionné des pépiniéristes et horticulteurs des différentes zones biogéographiques identifiées.
Carte des 11 régions biogéographiques établies sur le territoire national
FNE Ain s’engage pour développer la filière dans l’Ain !
Végétal local : qu’est-ce-que c’est ?
La marque Végétal local consiste à collecter, produire et planter des végétaux sauvages, typiques sur notre territoire. En effet, afin d’être le plus cohérent possible sur la provenance des végétaux, la France a été découpée en régions biogéographiques, selon le climat, la nature du sol et sa géologie ou encore les milieux naturels présents. Nous faisons partie du bassin Rhône Saône Jura, qui regroupe l’Ain, le Jura, le Doubs, les ¾ sud de la Haute-Loire et une partie des départements de la Côte-d’Or, de la Saône-et-Loire, du Rhône, de la Drôme, de l’Isère et de la Savoie.
Représentation du bassin Rhône-Saône-Jura et des départements concernés<br /> <br />
L’objectif : recréer des écosystèmes grâce à la réhabilitation d’une flore en accord avec les conditions climatiques et géographiques d’une région. Mais aussi garantir la traçabilité de ces végétaux et la conservation de leur diversité génétique. Le but est d’avoir sur le marché des gammes adaptées pour la restauration des fonctionnalités écologiques. Il s’agit aussi de favoriser des espèces rustiques et locales, plus résistantes aux changements globaux (hausse des températures, sécheresse, hivers rudes…) car porteuses d’adaptations génétiques spécifiques de leur territoire. Enfin, cette marque vise à soutenir des acteurs et filières économiques durables.
En réinjectant du sauvage dans le fleurissement, on limite également les risques de piéger, involontairement, les pollinisateurs en leur proposant des espèces qui semblent très attirantes, avec de belles couleurs et de grosses fleurs, mais qui ne leur offrent presque rien à manger. L’exemple le plus connu est le bleuet qui naturellement a des pétales fins et peu nombreux tout en disposant de beaucoup de nectar. Depuis plusieurs années, cette espèce est semée sous sa forme horticole, avec beaucoup plus de pétales mais n’offrant quasiment plus de nourriture pour nos bourdons et papillons !
: Illustration de la différence entre le bleuet horticole à pétales denses et le bleut sauvage plus délicat (mais bien plus utiles pour les pollinisateurs !)
Depuis trois ans maintenant, une filière de production pour les ligneux est structurée avec des collecteurs rémunérés, un centre de dépulpage au sein de l’APEI de Lons-le-Saunier (Jura) permettant de diversifier les activités proposées aux personnes en situation de handicaps qui y sont prises en charge, et des pépiniéristes qui mettent en culture et distribuent les plants. Ces mêmes plants, vous pouvez notamment les retrouver sur le territoire dans le cadre de programmes de plantation de haies comme les Marathons de la biodiversité !
Et aujourd’hui, qu’en est-il ?
La filière de production des ligneux est maintenant structurée et ne demande qu’à se développer sur le territoire. De nouvelles pépinières vont être rencontrées afin de pouvoir proposer plus de choix et de quantité.
Pour soutenir pour ces nouvelles pépinières et leur permettre de se lancer au mieux, la demande en plants doit augmenter en parallèle. Aménageurs du territoire, collectivités et bureaux d’études, pensez au Végétal local pour vos plantations !
Un guide de recommandation est en ligne si vous souhaitez en apprendre plus sur l’intégration de la marque Végétal local dans vos marchés publics :
Prescriptions techniques sur l’achat de végétaux sauvages d’origine locale
Depuis 2022, la filière concernant les herbacées se développe avec une longue mais nécessaire phase de réflexion et d’expérimentation. Pour cela, trois types d’approches se profilent :
1/ la collecte de semences en mélange qui peut répondre à deux objectifs.
Le premier concerne la restauration de prairie dans le but d’aider les agriculteurs à produire du fourrage de qualité pour le bétail, mais surtout en quantité pour tenir tout l’hiver. Pour cela, une brosseuse est utilisée sur des prairies sources, dont on connaît la composition floristique, afin de récolter les semences tout en laissant à disposition le foin pour l’exploitant. Ces semences sont ensuite semées à l’automne pour apporter de la diversité aux prairies dégradées ou pour transformer d’anciennes cultures en prairies. En quelques années, ces milieux naturels essentiels, tant pour les agriculteurs que pour les cortèges d’espèces associées tels que les oiseaux et les pollinisateurs, se régénèrent.
Le second concerne la restauration de milieux naturels, toujours sur la base de collecte de semences sur des parcelles sources.
Il peut s’agir de prairies ou de pelouses, en zone Natura 2000 par exemple, qui auraient subi une dégradation suite à un mauvais usage (passage d’engins motorisés, dépôts de matériaux inertes ou encore retournement). On recherche ici en priorité à retrouver un habitat le plus riche possible pour permettre de régénérer les interactions avec la faune sauvage.
Les opérations de revégétalisation lors de travaux de génie écologique, notamment la restauration des cours d’eau, peuvent également bénéficier de ce type de pratiques. En effet, d’une part le passage des engins lors des travaux peut abimer les prairies avoisinantes, et d’autre part, les talus réaménagés se retrouvent bien souvent à nue, en dehors des plantations et bouturages réalisés. Pour ce second cas, la réalisation d’un semis composé de graminées et d’espèces à fleurs comme la Marguerite, le Lotier corniculé ou encore le Plantain lancéolé permet de limiter les risques d’érosion et de potentielles inondations. (source : https ://hal.science/hal-02418098/document)
Enfin, tous autres travaux nécessitant la réalisation d’un couvert végétal : les talus routiers, les zones d’enfouissements ou encore la renaturation d’espaces artificialisés comme les carrières en fin d’exploitation ou les zones urbaines désimperméabilisées, peuvent également faire appel à des mélanges de semences de la marque.
Le syndicat mixte Veyle Vivante, précurseur dans ce domaine, a impulsé la dynamique et commencé à structurer un réseau d’acteurs autour de ce volet (www.veyle-vivante.com). Il ne reste plus qu’à l’étendre à tout le département afin d’impulser un accompagnement durable auprès des éleveurs du territoire et ainsi garantir le maintien des prairies, les plus naturelles possibles.
2/ la production de semences en espèces pures, pour la création de mélanges spécifiques de prairies fleuries non agricoles. Cette gamme pourra répondre à des commandes de collectivités, d’entreprises, ou de particuliers, souhaitant semer sur des surfaces plus ou moins grandes, des mélanges d’espèces. L’objectif ici est d’avoir des compositions spécifiques : attirer les pollinisateurs, les oiseaux, les auxiliaires de culture ou encore faire pousser des plantes comestibles voire tinctoriales. On retrouve souvent ces mélanges dans le commerce et en jardinerie mais leur composition est fréquemment douteuse (variétés horticoles, espèces non indigènes, origines de semences non spécifiées).
Pour les réaliser, il faut une première phase de récolte de graines sauvages par des collecteurs et collectrices, sur le territoire de commercialisation. Ensuite, ces graines vont être mises en multiplication, c’est-à-dire semées en bandes d’une espèce à la fois pour pouvoir récolter, soit à la main, soit à l’aide d’une brosseuse, un plus grand volume de semences, qui seront ensuite triées et agencées pour chaque mélange spécifique.
Légende : le papillon Aurore, dont le nom latin est Anthocharis cardamines, sur une de ses plantes hôtes, la Cardamine des prés. Sa chenille dépend notamment de cette plante pour se nourrir d’où le terme de « plante hôte ».
3/ la production des plantes en godets en lien avec les horticulteurs, afin de répondre à des besoins de végétalisation lors d’aménagements urbains, création de noues et bassin d’écrêtement des crues ou encore pour les particuliers, soucieux de choisir le végétal le plus adapté pour leur jardin.
Ici, plusieurs étapes sont nécessaires afin de fournir des semences en quantités suffisantes pour la mise en production. Une première phase de collecte en milieu naturel à la main selon le référentiel de la marque, puis une seconde étape de multiplication qui consiste à mettre en production les espèces ciblées pour récolter l’année suivante un plus grand volume de semences qui sera ensuite revendu aux horticulteurs bénéficiaires de la marque.
Premiers résultats chez les deux horticulteurs de l’Ain à partir de semences collectées sur le bassin RSJ en 2022 et semées au printemps 2023.<br /> <br />
Aujourd’hui, en août 2023, nous n’en sommes pas encore à ce niveau de structuration mais c’est bien vers cette vision que nous souhaitons tendre. Pour y arriver, nous sommes accompagnés par deux horticulteurs du territoire, Bresse production et les Serres du Baderand, ainsi que René-Yves Padernoz, en limite Alpes, qui réalisent les premiers essais sur des semences collectées selon le référentiel de la marque. Grâce à eux, nous pouvons avoir des premiers retours concernant la mise en culture et les taux de germination de certaines espèces, et ils nous apportent leur regard d’expert sur la production florale.
Si l’aventure Végétal local vous tente et que vous souhaitez apporter votre graine à ce beau projet, nous sommes à la recherche de collecteurs bénévoles pour les ligneux mais également pour les herbacées !
Vous êtes un.e pépiniériste ou un horticulteur/une horticultrice et produire des espèces sauvages ne vous fait pas peur ? Vous pouvez répondre à notre questionnaire et si vous le souhaitez, réaliser des essais sur un lot de graines qui seront collectées cette année en cliquant ICI. Merci de le télécharger avant de le remplir pour le pas écraser les réponses éventuelles et de nous le retourner à l’adresse suivante : marie.zelazny@fne-aura.org
Vous avez un projet de renaturation d’un espace, un projet de fleurissement, et vous souhaiteriez y intégrer du Végétal local ? Vous pouvez trouver les producteurs du bassin Rhône Saône Jura sur le site de la marque, ou nous contacter directement pour plus de renseignements.
Nos contacts :
Sophie GINTER, filière ligneux – antenne Saint-Germain-de-Joux<br /> <br /> sophie.ginter@fne-aura.org<br /> 04 50 56 16 55<br /> <br /> Marie ZELAZNY, filière herbacées – antenne Bourg-en-Bresse<br /> <br /> marie.zelazny@fne-aura.org<br /> 07 81 10 71 84<br />
Avec le soutien financier de la l’Union Européenne (LEDER-FEADER), de la Région AuRA et de l’OFB, et à grâce à l’implication de Jura Nature Environnement (JNE)
Je veux agir et être informé·e des prochains événements «végétal local»
https://fra01civi.fne-apne.net/civicrm/event/register?id=94&reset=1
Publié par FNE Ain
Le Mercredi 23 août 2023
https://www.fne-aura.org/actualites/ain/vegetal-local/
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