RN88 : le chantier avance, les impacts environnementaux augmentent encore et le CNPN dit toujours « non »
Le Conseil national de la protection de la nature (CNPN) a renouvelé son avis défavorable le 23 septembre 2024. Découvrez notre point d'étape.
En Auvergne Rhône-Alpes, une espèce sur trois est menacée de disparition [1]. Les 10,7 km de déviation de la RN88 entre Saint-Hostien et Le Pertuis (Haute-Loire) menacent de détruire à eux seuls 105 espèces protégées (5 nouvelles espèces protégées ont été découvertes depuis 2020) et plus de 25 ha de zones humides.
FNE Haute-Loire, FNE Auvergne Rhône-Alpes (FNE AURA), SOS Loire Vivante et l’Association des Usagers des Transports d’Auvergne (AUTA Auvergne) s’opposent à ce projet depuis janvier 2021 et contestent l’autorisation environnementale de destruction des espèces et zones humides accordée par l’État en octobre 2020.
Où en sommes-nous aujourd’hui ?
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Le chantier avance
Les grands ouvrages d’art se construisent et les engins poursuivent la destruction (dénommée « défavorabilisation ») des biotopes [2] (forêts, prairies, haies, mares et murets).
Photo : « Défavorabilisation » en zone forestière.
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Certains terrains restent non acquis
A ce jour, tous les terrains nécessaires à la déviation ne sont toujours pas encore acquis.
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Des mesures compensatoires non garanties
La maîtrise et la gestion des zones dites de compensation des impacts environnementaux ne sont pas encore garanties.
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Notre recours n’est toujours pas jugé
Depuis 2021, le recours de FNE Haute-Loire, FNE AURA, SOS Loire Vivante et de AUTA Auvergne auprès du tribunal de Clermont-Ferrand a nécessité une multiplication de mémoires complémentaires en réponse aux nombreux mémoires successifs de l’État et de la Région, mais il n’est toujours pas jugé.
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Par contre, les emprises au sol du projet ont encore augmenté
Depuis 2019, le projet a évolué et les emprises ont encore augmenté :
- + 35% d’emprises supplémentaires,
- et + 22% d’emprises sur les zones humides.
Soit autant d’impacts supplémentaires sur la biodiversité, pour lesquels des mesures compensatoires sont promises (sans qu’aucun objectif de réussite ne soit précisé !) et devraient être imposées par l’État.
Cinq ans après l’étude d’impact de 2019, le maître d’ouvrage a notamment fini par admettre la nécessité de prendre en compte les impacts des dépôts de matériaux excédentaires. Il s’avère que 36 zones de dépôts de matériaux non réutilisables seront nécessaires (plus de 800 000 m3 pour 10,7 km de déviation !) pour stocker les matériaux issus notamment des très hauts déblais qui vont entailler les anciens volcans des Sucs.
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Une multiplication de dossiers et la recherche d’avis plus favorables
En 2023 puis en 2024, le maître d’ouvrage a produit de très volumineux dossiers complémentaires (plus de 400 pages). Des avis plus favorables de la part de l’Autorité environnementale et du CNPN ont notamment été recherchés en 2024. Non convaincus, ces derniers ont maintenu leurs critiques et le CNPN a renouvelé son avis défavorable le 23 septembre 2024.
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Une transparence toujours relative
Enfin, bien que le maître d’ouvrage affiche l’exemplarité de cette déviation, la transparence vis à vis du public reste toute relative. Nous avions dû recourir au tribunal administratif pour obtenir un document enfin lisible concernant les mesures compensatoires (Voir notre communiqué RN88 : La rétention d’informations environnementales par l’État et la Région jugée illégale).
Par le biais d’une enquête par voie électronique, et sur la base de nouveaux dossiers (jusqu’à 2000 pages au total !), l’État a sollicité l’avis du public en juillet 2023 sur les évolutions du projet, + d’infos. Cependant, plus d’un an après, les résultats de cette enquête n’ont toujours pas été publiés. Des avis plus favorables et plus unanimes du public seront-ils à nouveau recherchés grâce aux nouveaux dossiers et nouveaux avis des services de l’État en 2025 ?
Qu’en penser ?
Ce « petit » projet de déviation de la RN88 est l’exemple de ces projets d’un autre temps, qui en choisissant les vieux tracés des années 1990, sous-estiment les évolutions climatiques et les nécessaires préservations des sols, des terres agricoles, de la biodiversité (exceptionnelle à cet endroit et pour notre région) et des zones humides.
Du fait de mauvais choix initiaux, la Région Auvergne Rhône-Alpes consomme des crédits en multipliant des dossiers visant à justifier ce projet anachronique et surdimensionné au regard des besoins du trafic existant. Les services de l’État sur-sollicités (dans un contexte d’effectifs en réduction constante) sont contraints de multiplier les avis.
Photo : Pelleteuse travaillant hors emprise.
Et nous, associations, nous nous épuisons à contester un arrêté que nous affirmons illégal et à surveiller un chantier qui, en toute logique, a des difficultés à respecter pas moins de soixante mesures de réduction et compensation imposés par l’arrêté de 2020 !
Et pendant ce temps, les habitants du Pertuis et de Saint-Hostien attendent une solution pour réduire les nuisances qu’ils subissent…
Publié par FNE Auvergne Rhône Alpes
Le Jeudi 07 novembre 2024
https://www.fne-aura.org/actualites/region/rn88-le-chantier-avance-les-impacts-environnementaux-augmentent-encore-et-le-cnpn-dit-toujours-non/
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