Raz la bassine !
Lors du week-end de l’Ascension, nous avons assisté dans la plaine de Limagne (Puy-de-Dôme) à une mobilisation conjointe d’une partie du monde agricole et de citoyens, regroupés en association ou non, pour la préservation de notre bien commun le plus précieux : l’eau douce. Pourquoi ?
Chère amie, cher ami,
Lors du week-end de l’Ascension, nous avons assisté dans la plaine de Limagne (Puy-de-Dôme) à une mobilisation conjointe d’une partie du monde agricole et de citoyens, regroupés en association ou non, pour la préservation de notre bien commun le plus précieux : l’eau douce. Pourquoi ? Parce qu’une fois de plus, une poignée d’agriculteurs regroupés dans une association d’irrigants au nom sympathique de « Turlurons », mais en réalité faux nez de la coopérative Limagrain et homme lige de l’omniprésente FNSEA, veut détourner à la fois l’eau et l’argent public à son profit.
Rien de moins que deux giga bassines, les plus grandes de France : 1 million de mètres cubes pour l’une et 1,2 millions de mètres cubes pour l’autre sont projetées sur 30 hectares de terrain fertile. Ceux qui sont censés préserver les terres de l’artificialisation sont une nouvelle fois ceux qui artificialisent ! Sur 30 hectares, on peut produire en agriculture biologique intensive de quoi nourrir pendant une année entière 300 familles en légumes frais et de garde.
Pour produire quoi ? Du maïs bien sûr ! Et après, les irrigants vont nous dire qu’ils nourrissent le monde, comme si le maïs était la base de notre alimentation ! De qui se moque-t-on ? On va vous dire qu’il y a aussi des légumes et d’autres cultures ; certes oui, un peu… La stratégie est toujours la même : on avance les cultures minoritaires, voire ultra-minoritaires, pour masquer l’omnipotent maïs semencier. Plutôt que de s’adapter et de rechercher des zones géographiques désormais plus propices, l’agriculture industrielle fait toujours le choix de piller la ressource en eau jusqu’à la dernière goutte.
Et pourtant, elle est tellement proche la limite de ce modèle d’agriculture industrielle fondée sur l’irrigation. L’Espagne en est l’exemple criant : elle n’a plus d’eau malgré des réservoirs immenses et des transferts d’eau massifs d’un fleuve à l’autre. Les espagnols découvrent avec stupeur que retenues et bassines ne créent pas d’eau quand il ne pleut pas ! Au contraire, elles aggravent les sècheresses hydrologiques et contribuent à la désertification. Nous avons aussi dans notre douce France l’exemple des Pyrénées Orientales, où les producteurs d’abricots gavés de pesticides voudraient mette le pauvre Têt à sec ! Pourquoi notre gouvernement s’obstine-t-il a suivre un chemin qui mène au précipice ? Pourquoi favorise-t-il toujours les lobbies industriels au détriment des rapports des scientifiques et des associations citoyennes ? Par lâcheté ? Par compromission ? Par incompétence ? Par croyance ? Ces questions sont ouvertes…
Sur ces territoires où le climat a déjà changé de manière très notable, il est temps de changer de culture(s). Les abricotiers ont fait leur temps dans le Roussillon, le maïs semencier a fait son temps dans les Limagnes. Le vin à l’hectolitre a lui aussi fait son temps. Si les réserves d’eau pour le maraîchage, l’arboriculture et l’abreuvement du bétail sont légitimes, l’accaparement de l’eau pour irriguer de la vigne ou des grandes cultures est inacceptable. Et si d’abord on commençait par optimiser et réutiliser les stockages existants, soit au total le chiffre déjà astronomique de 17 milliards de mètres cube d’eau !
Si les retenues d’eau ne créent pas de pluie, les arbres si ! Et si plutôt que d’arracher des haies ou de les ratiboiser, on les replantait avec de grands arbres dont l’évapotranspiration génère la pluie ? Le désormais disparu crachin Breton ou Normand n’était autre que cela !
Chère amie, cher ami, nous avons de belles luttes devant nous ! Je vous sers un verre sous un grand chêne pendant que ces glands creusent des trous ?
Eric Feraille, Pilote Réseaux Juridique & Montagne
Édito de la newletter mensuelle
Publié par FNE Auvergne Rhône Alpes
Le Vendredi 24 mai 2024
https://www.fne-aura.org/actualites/region/raz-la-bassine/
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