RN88 : Malgré des alternatives possibles, la Région autorisée à détruire la biodiversité
Après près de 4 ans de procédure, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rendu son jugement sur la déviation de la RN88 entre Le Pertuis et Saint-Hostien (Haute-Loire).
Après près de 4 ans de procédure, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rendu son jugement sur la déviation de la RN88 entre Le Pertuis et Saint-Hostien (Haute-Loire). Les associations de protection de la nature FNE Auvergne-Rhône-Alpes, FNE Haute-Loire, S.O.S Loire Vivante et l’Association des Usagers des Transports d’Auvergne déplorent une décision en demi-teinte pour la biodiversité. Bien que le tribunal valide le projet, il relève une irrégularité concernant le calendrier des mesures compensatoires et impose à la Région leur mise en œuvre avant tout travaux pouvant nuire à la biodiversité. Néanmoins, les associations regrettent qu’aucune alternative à ce tracé n’ait été sérieusement recherchée avant les travaux afin de réduire les coûts, garantir la sécurité et limiter l’impact sur la nature.
Une décision en demi-teinte pour la biodiversité
Les associations de protection de la nature prennent acte de la décision du tribunal administratif de Clermont-Ferrand qui, malgré les avis réitérés de l’Autorité Environnementale et du Conseil National de Protection de la Nature, valide le projet et refuse notamment d’entendre leur argument tiré de l’absence de recherche sérieuse de solutions alternatives (condition pourtant imposée par la réglementation pour pouvoir porter atteinte aux 105 espèces protégées impactées par cette déviation de 10,7 kilomètres).
Le tribunal nous donne cependant raison en relevant une irrégularité liée au calendrier de mise en œuvre des mesures compensatoires. Alors que l’arrêté préfectoral de 2020 prévoyait que ces mesures soient finalisées « avant la fin des travaux », le tribunal juge que ces mesures doivent être réalisées avant l’exécution de toutes mesures ou travaux susceptibles de porter atteinte à la biodiversité. Ce faisant, il confirme ce que les associations s’évertuent à dire depuis plusieurs années : les mesures compensatoires doivent être effectives avant toute dégradation des milieux naturels.
Les associations regrettent cependant que le tribunal n’ait pas retenu leurs arguments contestant à la fois la raison impérative d’intérêt public majeur et le choix d’une route dont le tracé et les caractéristiques sont particulièrement nocives pour la biodiversité et les zones humides.
Des alternatives de tracés alliant économies, services à la population, sécurité et biodiversité négligées par le maître d’ouvrage
Si les associations contestent les atteintes à la biodiversité, elles n’ont en revanche jamais nié la nécessité de prendre en compte les nuisances subies par les habitants dans la traversée des villages de Saint-Hostien et du Pertuis. Cependant, elles regrettent que ce jugement entérine un choix de tracé obsolète datant des années 1990, totalement déconnecté des enjeux écologiques et climatiques actuels. Outre ces enjeux, il est tout aussi regrettable que les seules difficultés techniques, le volume prévisible de matériaux excédentaires et le coût de la solution choisie à 2×2 voies n’aient pas incité, dès 2019, le maître d’ouvrage à rechercher d’autres solutions. Ces alternatives, plus compatibles avec les restrictions budgétaires actuellement souhaitées, auraient ainsi permis de réduire de moitié le coût d’une déviation de 10.7 kilomètres estimé aujourd’hui à 400 millions d’euros (au lieu des 226 millions initialement prévus).
Les associations vigilantes à la réalisation effective et efficace des mesures compensatoires avant la reprise du chantier
Pour Martine Chatain, responsable du Réseau (A)ménager les territoires de FNE AURA : « Ce jugement ne sera sûrement pas une surprise pour l’État puisque, compte-tenu des évolutions du tracé (qui augmentent encore les impacts sur la biodiversité et les zones humides !), un nouvel arrêté modificatif était déjà prévu pour 2025. De plus, grâce à ces 4 années de procédure, le maître d’ouvrage aura pu avancer dans la réalisation des ouvrages et dans la définition des dites mesures compensatoires. Ce jugement devrait cependant le contraindre à finaliser celles-ci avant toute reprise du chantier ».
Afin de prévenir toute atteinte supplémentaire aux espèces protégées et à leurs habitats exceptionnels dans ce secteur, les associations continueront d’exercer une vigilance accrue sur ce chantier afin de veiller à la mise en œuvre effective et efficace des mesures de réduction des impacts et des mesures compensatoires.
Pour aller plus loin
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Contacts presse
- Martine CHATAIN, FNE Auvergne-Rhône-Alpes, 06 85 75 16 34.
- Renaud DAUMAS, FNE Haute-Loire, 07 49 28 39 48.
Publié par FNE Auvergne Rhône Alpes
Le Jeudi 19 décembre 2024
https://www.fne-aura.org/communiques/region/rn88-malgre-des-alternatives-possibles-la-region-autorisee-a-detruire-la-biodiversite/
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